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Déjà 1 374 jours depuis mon retour à Montréal

Ma réponse à une discussion sur MtlUrb, à propos du retour à Montréal (dans le contexte de la perception d’un mouvement de personnes vers l’extérieur de Montréal).

Version courte: depuis que je suis revenu à Montréal, je me rends compte qu’il fait bon y vivre.

Je suis né à Montréal en 1972 et, à part des voyages occasionnels, je n’ai pas vécu ailleurs jusqu’en 1994. Par contre, de 1994 à 2008, j’ai déménagé un grand nombre de fois.

Le premier de ces déménagements était vers Lausanne (en Suisse), la ville natale de mon père. J’y ai passé quinze mois dans d’excellentes conditions. D’ailleurs, si la Suisse vivait une sorte de crise économique à l’époque, le climat social était généralement assez positif pour des gens comme moi. Je m’y suis donc senti à mon aise.

Lorsque j’ai quitté Lausanne pour revenir à Montréal, en août 1995, je suis passé d’un milieu où les questions financières étaient taboues à un contexte où les problèmes d’argent dominaient toutes les conversations. Mon impression du Québec en 1995 était celle d’un marasme profond, surtout causé par la situation économique. Ma propre situation financière était relativement positive (elle s’est détérioriée assez rapidement), mais je me sentais comme si tout allait mal pour tout le monde. Les indicateurs économiques de l’époque contredisent probablement mon impression, mais c’est là la grande différence entre une approche macroscopique quantitative et l’expérience vécue.

J’ai passé quelques temps à Montréal depuis ce temps, mais c’est aussi pendant ce temps que je me suis déplacé le plus souvent. Par exemple, de février 2002 à décembre 2007, j’ai effectué 20 déménagements, entre huit villes différentes (au Mali, au Nouveau-Brunswick, en Indiana, au Massachusetts et au Texas). Je revenais à Montréal au cours de plusieurs de ces déménagements. D’ailleurs, je conservais un pied-à-terre à Montréal. Mais je n’étais «installé» nulle part.

Le 26 avril 2008, j’ai effectué mon dernier déménagement en date et je n’ai pas bougé depuis. Je ne peux pas vraiment dire que je me suis installé définitivement à Montréal, mais ces 1374 jours passés dans ma ville natale constituent la plus longue période de stabilité, pour moi, depuis 1994.

C’est d’ailleurs depuis avril 2008 que je redeviens Québécois. Étape par étape.

Si je suis revenu à Montréal, c’est en grande partie pour des raisons personnelles. J’aurais pu aller ailleurs, mais c’était tout compte fait plus facile de revenir ici, du moins temporairement. J’avais même pensé utiliser mon retour à Montréal comme un tremplin vers autre chose (même pensé à Edmonton, à un certain moment; ou même à la Corée). Revenir à Montréal, c’était une «solution de facilité», une “fallback solution”.

Même si mon réseau social s’est distendu au cours de mes déplacements du début du siècle, je conservais plusieurs contacts ici qui m’ont aidé à me reconstruire un système de support social. Revenir à Montréal, c’était renforcer mes contacts avec certains membres de ma famille et avec plusieurs de mes amis.

D’ailleurs, en ce moment, une grande partie de mes contacts sur divers réseaux sociaux en-ligne (Twitter, Facebook, G+, LinkedIn…) sont locaux. Pas que je sois chauvin ou fermé, bien au contraire! En tant qu’anthropologue, je chéris la diversité humaine et j’ai beaucoup apprécié ma vie hors de Montréal. Mais la base locale des réseaux sociaux est un aspect non-négligeable, dans mon cas. Beaucoup de mes rapports sociaux s’effectuent en face-à-face et, hormis quelques cas particuliers, c’est le cas de la plupart des gens. Autrement dit, nous avons beau passer beaucoup de temps en-ligne, les rapports sociaux ont généralement un ancrage dans les interactions directes, locales, «en présentiel».

Ainsi, le fait de revenir à Montréal était, pour moi, une façon de renforcer la partie locale de mon propre réseau social. Je pouvais donc retrouver une vie sociale qu’il m’a été difficile d’avoir lorsque je bougeais d’une ville à l’autre.

D’autres motivations étaient plus professionnelles. Par exemple, ayant enseigné quelques cours à Concordia entre 2006 et 2007, il m’était plus facile d’obtenir des charges de cours à cette université qu’ailleurs dans le monde (même si j’ai eu l’occasion d’enseigner à sept autres endroits, dont cinq aux États-Unis). Évidemment, mon réseau social a aussi contribué aux motivations professionnelles de mon retour à Montréal en me dressant un portrait assez positif de la situation de l’emploi à Montréal. En d’autres termes, je suis revenu à Montréal sur l’impression, provenant de mon réseau social, qu’il était maintenant possible de bien vivre ici.

Cette impression ne s’est pas démentie.

Austin (ATX), capitale du Texas, est le dernier endroit où j’ai habité avant mon retour à Montréal. Contrairement à de nombreuses autres villes américaines à l’époque (fin 2007 et début 2008), ATX était plus ou moins épargnée par la crise financière. C’est du moins ce qui se disait dans les journaux et bars locaux. Même s’il est possible de prouver que la situation d’Austin était plus fragile que ce que l’opinion publique en disait, le fait est qu’il n’y avait pas de marasme économique à ATX à l’époque. Ayant connu un véritable marasme à Montréal en 1995, j’étais à l’affût des signes avant-coureurs d’un problème similaire à Austin douze ans plus tard. Le fait que les gens parlaient quotidiennement de la crise et de problèmes d’argent allait déjà dans le sens du marasme, même si ces mêmes conversations sortaient explicitement ATX de ce bourbier. «Les choses vont vraiment mal, en ce moment. Mais nous sommes épargnés pour l’instant.» Puisque ma propre situation à Austin n’était pas tout à fait reluisante, rien de très encourageant de ce côté. Il est fort possible qu’un manque d’enthousiasme face à la situation économique des États-Unis et du Texas ait été une particularité des milieux sociaux auxquels je me mêlais, à l’époque. Néanmoins, tant dans le milieu universitaire (qui venait de connaître des coupures drastiques) que dans celui plus populaire des brasseurs de bière, un optimisme bien prudent semblait régner.

Le contraste, peu après mon retour à Montréal, était assez flagrant. Malgré divers problèmes économiques, les milieux dans lesquels je me suis (ré)inséré faisaient figure d’oasis de paix, en comparaison avec mon expérience à Austin en 2007–2008 (ou à Montréal en 1995). Ceux qui parlaient de leur situation financière faisaient rarement référence à un problème plus large. Plusieurs personnes quittaient des emplois stables pour se lancer dans divers projets plus risqués. Sans que l’on puisse parler d’euphorie, régnait ici une atmosphère plutôt paisible, face à la situation financière. C’était pas l’âge d’or du Québec (que l’on situe plus facilement lors de la période entre Expo 67 et les JO de 1976).

Il est fort possible que, tout comme celle que j’ai eu d’Austin, mon impression de Montréal provenait des milieux dans lesquels j’œuvrais. Entre autres, il y avait une certaine effervescence dans ce que j’appelle «la scène geek montréalaise». C’est parmi eux que se trouvaient certains des plus idéalistes, qui misaient une partie de leurs vies pour des projets qui leur tenaient à cœur. En 2008, il n’était pas rare pour des membres de cette «scène» de se faire proposer des contrats assez lucratifs sans qu’ils aient besoin d’effectuer des recherches approfondies. Les acteurs du Web, par exemple, trouvaient facilement quelque-chose à faire, sans avoir à chercher bien loin. On parle d’un groupe assez restreint (je l’estimerais à environ 500 personnes), mais la possibilité que j’avais de m’y insérée a contribué assez largement à mon impression de Montréal. D’ailleurs, depuis mon retour, j’ai obtenu plusieurs contrats très intéressants sans avoir à chercher bien activement.

L’autre sphère d’action de ma vie montréalaise, le milieu universitaire, me donnait aussi un certain air de sérénité. S’il y a très peu de postes permanents dans ce milieu, à l’échelle du continent, il m’a été possible de donner de plus en plus de cours, à Concordia. En fait, pour la première fois de ma carrière, je peux dire que j’ai commencé à me tailler une place dans ce milieu. Sans devenir indispensable et tout en gardant un fort sens critique face au milieu académique, je suis plus à l’aise avec mon statut de «chargé de cours + travailleur autonome». D’ailleurs, petit-à-petit, je commence à trouver plus de liens entre les deux dimensions de ma vie professionnelle. Assez confortable, comme situation. Pour moi, ça vaut plus qu’un gros salaire.

Puisque la situation financière du lieu où je vis a beaucoup d’implications sur mon expérience en cet endroit, c’est une bonne occasion de préciser ma pensée là-dessus. Ma propre situation financière a évidemment un impact important sur ma vie, compte tenu d’un système social qui accorde énormément d’importance à l’argent. Mais, ce qui m’affecte le plus, c’est le «climat social» dans lequel je vis. Un marasme ambiant a un impact négatif plus grand sur moi que des problèmes financiers. D’autre part, lorsque l’atmosphère générale est plutôt positive et que les questions d’argent font rarement leur apparition dans les conversations que je peux avoir avec les gens autour de moi, je m’en porte mieux même si ma situation personnelle n’est pas très reluisante.

Et c’est probablement un bon point où terminer cette réflexion au sujet de mon retour à Montréal. Je suis revenu à Montréal (et j’y demeure depuis près de quatre ans) parce qu’il fait bon y vivre.

Du moins, c’est la partie impersonnelle. Pour l’aspect personnel, ce sera pour un autre jours.

Espace social et innovation ouverte

Présentation pour le panel « Innovation ouverte et living labs, la divergence cohésive par les réseaux sociaux ?» organisé par Patrick Dubé dans le cadre de la dixième conférence internationale webcom Montréal.

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Intimacy, Network Effect, Hype

Is “intimacy” a mere correlate of the network effect?

Can we use the network effect to explain what has been happening with Quora?

Is the Quora hype related to network effect?

I really don’t feel a need to justify my dislike of Quora. Oh, sure, I can explain it. At length. Even on Quora itself. And elsewhere. But I tend to sense some defensiveness on the part of Quora fans.

[Speaking of fans, I have blogposts on fanboism laying in my head, waiting to be hatched. Maybe this will be part of it.]

But the important point, to me, isn’t about whether or not I like Quora. It’s about what makes Quora so divisive. There are people who dislike it and there are some who defend it.

Originally, I was only hearing from contacts and friends who just looooved Quora. So I was having a “Ionesco moment”: why is it that seemingly “everyone” who uses it loves Quora when, to me, it represents such a move in the wrong direction? Is there something huge I’m missing? Or has that world gone crazy?

It was a surreal experience.

And while I’m all for surrealism, I get this strange feeling when I’m so unable to understand a situation. It’s partly a motivation for delving into the issue (I’m surely not the only ethnographer to get this). But it’s also unsettling.

And, for Quora at least, this phase seems to be over. I now think I have a good idea as to what makes for such a difference in people’s experiences with Quora.

It has to do with the network effect.

I’m sure some Quora fanbois will disagree, but it’s now such a clear picture in my mind that it gets me into the next phase. Which has little to do with Quora itself.

The “network effect” is the kind of notion which is so commonplace that few people bother explaining it outside of introductory courses (same thing with “group forming” in social psychology and sociology, or preferential marriage patterns in cultural anthropology). What someone might call (perhaps dismissively): “textbook stuff.”

I’m completely convinced that there’s a huge amount of research on the network effect, but I’m also guessing few people looking it up. And I’m accusing people, here. Ever since I first heard of it (in 1993, or so), I’ve rarely looked at explanations of it and I actually don’t care about the textbook version of the concept. And I won’t “look it up.” I’m more interested in diverse usage patterns related to the concept (I’m a linguistic anthropologist).

So, the version I first heard (at a time when the Internet was off most people’s radar) was something like: “in networked technology, you need critical mass for the tools to become truly useful. For instance, the telephone has no use if you’re the only one with one and it has only very limited use if you can only call a single person.” Simple to the point of being simplistic, but a useful reminder.

Over the years, I’ve heard and read diverse versions of that same concept, usually in more sophisticated form, but usually revolving around the same basic idea that there’s a positive effect associated with broader usage of some networked technology.

I’m sure specialists have explored every single implication of this core idea, but I’m not situating myself as a specialist of technological networks. I’m into social networks, which may or may not be associated with technology (however defined). There are social equivalents of the “network effect” and I know some people are passionate about those. But I find that it’s quite limiting to focus so exclusively on quantitative aspects of social networks. What’s so special about networks, in a social science perspective, isn’t scale. Social scientists are used to working with social groups at any scale and we’re quite aware of what might happen at different scales. But networks are fascinating because of different features they may have. We may gain a lot when we think of social networks as acephalous, boundless, fluid, nameless, indexical, and impactful. [I was actually lecturing about some of this in my “Intro to soci” course, yesterday…]

So, from my perspective, “network effect” is an interesting concept when talking about networked technology, in part because it relates to the social part of those networks (innovation happens mainly through technological adoption, not through mere “invention”). But it’s not really the kind of notion I’d visit regularly.

This case is somewhat different. I’m perceiving something rather obvious (and which is probably discussed extensively in research fields which have to do with networked technology) but which strikes me as missing from some discussions of social networking systems online. In a way, it’s so obvious that it’s kind of difficult to explain.

But what’s coming up in my mind has to do with a specific notion of “intimacy.” It’s actually something which has been on my mind for a while and it might still need to “bake” a bit longer before it can be shared properly. But, like other University of the Streets participants, I perceive the importance of sharing “half-baked thoughts.”

And, right now, I’m thinking of an anecdotal context which may get the point across.

Given my attendance policy, there are class meetings during which a rather large proportion of the class is missing. I tend to call this an “intimate setting,” though I’m aware that it may have different connotations to different people. From what I can observe, people in class get the point. The classroom setting is indeed changing significantly and it has to do with being more “intimate.”

Not that we’re necessarily closer to one another physically or intellectually. It needs not be a “bonding experience” for the situation to be interesting. And it doesn’t have much to do with “absolute numbers” (a classroom with 60 people is relatively intimate when the usual attendance is close to 100; a classroom with 30 people feels almost overwhelming when only 10 people were showing up previously). But there’s some interesting phenomenon going on when there are fewer people than usual, in a classroom.

Part of this phenomenon may relate to motivation. In some ways, one might expect that those who are attending at that point are the “most dedicated students” in the class. This might be a fairly reasonable assumption in the context of a snowstorm but it might not work so well in other contexts (say, when the incentive to “come to class” relates to extrinsic motivation). So, what’s interesting about the “intimate setting” isn’t necessarily that it brings together “better people.” It’s that something special goes on.

What’s going on, with the “intimate classroom,” can vary quite a bit. But there’s still “something special” about it. Even when it’s not a bonding experience, it’s still a shared experience. While “communities of practice” are fascinating, this is where I tend to care more about “communities of experience.” And, again, it doesn’t have much to do with scale and it may have relatively little to do with proximity (physical or intellectual). But it does have to do with cognition and communication. What is special with the “intimate classroom” has to do with shared assumptions.

Going back to Quora…

While an online service with any kind of network effect is still relatively new, there’s something related to the “intimate setting” going on. In other words, it seems like the initial phase of the network effect is the “intimacy” phase: the service has a “large enough userbase” to be useful (so, it’s achieved a first type of critical mass) but it’s still not so “large” as to be overwhelming.

During that phase, the service may feel to people like a very welcoming place. Everyone can be on a “first-name basis. ” High-status users mingle with others as if there weren’t any hierarchy. In this sense, it’s a bit like the liminal phase of a rite of passage, during which communitas is achieved.

This phase is a bit like the Golden Age for an online service with a significant “social dimension.” It’s the kind of time which may make people “wax nostalgic about the good ole days,” once it’s over. It’s the time before the BYT comes around.

Sure, there’s a network effect at stake.  You don’t achieve much of a “sense of belonging” by yourself. But, yet again, it’s not really a question of scale. You can feel a strong bond in a dyad and a team of three people can perform quite well. On the other hand, the cases about which I’m thinking are orders of magnitude beyond the so-called “Dunbar number” which seems to obsess so many people (outside of anthro, at least).

Here’s where it might get somewhat controversial (though similar things have been said about Quora): I’d argue that part of this “intimacy effect” has to do with a sense of “exclusivity.” I don’t mean this as the way people talk about “elitism” (though, again, there does seem to be explicit elitism involved in Quora’s case). It’s more about being part of a “select group of people.” About “being there at the time.” It can get very elitist, snobbish, and self-serving very fast. But it’s still about shared experiences and, more specifically, about the perceived boundedness of communities of experience.

We all know about early adopters, of course. And, as part of my interest in geek culture, I keep advocating for more social awareness in any approach to the adoption part of social media tools. But what I mean here isn’t about a “personality type” or about the “attributes of individual actors.” In fact, this is exactly a point at which the study of social networks starts deviating from traditional approaches to sociology. It’s about the special type of social group the “initial userbase” of such a service may represent.

From a broad perspective (as outsiders, say, or using the comparativist’s “etic perspective”), that userbase is likely to be rather homogeneous. Depending on the enrollment procedure for the service, the structure of the group may be a skewed version of an existing network structure. In other words, it’s quite likely that, during that phase, most of the people involved were already connected through other means. In Quora’s case, given the service’s pushy overeagerness on using Twitter and Facebook for recruitment, it sounds quite likely that many of the people who joined Quora could already be tied through either Twitter or Facebook.

Anecdotally, it’s certainly been my experience that the overwhelming majority of people who “follow me on Quora” have been part of my first degree on some social media tool in the recent past. In fact, one of my main reactions as I’ve been getting those notifications of Quora followers was: “here are people with whom I’ve been connected but with whom I haven’t had significant relationships.” In some cases, I was actually surprised that these people would “follow” me while it appeared like they actually weren’t interested in having any kind of meaningful interactions. To put it bluntly, it sometimes appeared as if people who had been “snubbing” me were suddenly interested in something about me. But that was just in the case of a few people I had unsuccessfully tried to engage in meaningful interactions and had given up thinking that we might not be that compatible as interlocutors. Overall, I was mostly surprised at seeing the quick uptake in my follower list, which doesn’t tend to correlate with meaningful interaction, in my experience.

Now that I understand more about the unthinking way new Quora users are adding people to their networks, my surprise has transformed into an additional annoyance with the service. In a way, it’s a repeat of the time (what was it? 2007?) when Facebook applications got their big push and we kept receiving those “app invites” because some “social media mar-ke-tors” had thought it wise to force people to “invite five friends to use the service.” To Facebook’s credit (more on this later, I hope), these pushy and thoughtless “invitations” are a thing of the past…on those services where people learnt a few lessons about social networks.

Perhaps interestingly, I’ve had a very similar experience with Scribd, at about the same time. I was receiving what seemed like a steady flow of notifications about people from my first degree online network connecting with me on Scribd, whether or not they had ever engaged in a meaningful interaction with me. As with Quora, my initial surprise quickly morphed into annoyance. I wasn’t using any service much and these meaningless connections made it much less likely that I would ever use these services to get in touch with new and interesting people. If most of the people who are connecting with me on Quora and Scribd are already in my first degree and if they tend to be people I have limited interactions, why would I use these services to expand the range of people with whom I want to have meaningful interactions? They’re already within range and they haven’t been very communicative (for whatever reason, I don’t actually assume they were consciously snubbing me). Investing in Quora for “networking purposes” seemed like a futile effort, for me.

Perhaps because I have a specific approach to “networking.”

In my networking activities, I don’t focus on either “quantity” or “quality” of the people involved. I seriously, genuinely, honestly find something worthwhile in anyone with whom I can eventually connect, so the “quality of the individuals” argument doesn’t work with me. And I’m seriously, genuinely, honestly not trying to sell myself on a large market, so the “quantity” issue is one which has almost no effect on me. Besides, I already have what I consider to be an amazing social network online, in terms of quality of interactions. Sure, people with whom I interact are simply amazing. Sure, the size of my first degree network on some services is “well above average.” But these things wouldn’t matter at all if I weren’t able to have meaningful interactions in these contexts. And, as it turns out, I’m lucky enough to be able to have very meaningful interactions in a large range of contexts, both offline and on. Part of it has to do with the fact that I’m teaching addict. Part of it has to do with the fact that I’m a papillon social (social butterfly). It may even have to do with a stage in my life, at which I still care about meeting new people but I don’t really need new people in my circle. Part of it makes me much less selective than most other people (I like to have new acquaintances) and part of it makes me more selective (I don’t need new “friends”). If it didn’t sound condescending, I’d say it has to do with maturity. But it’s not about my own maturity as a human being. It’s about the maturity of my first-degree network.

There are other people who are in an expansionist phase. For whatever reason (marketing and job searches are the best-known ones, but they’re really not the only ones), some people need to get more contacts and/or contacts with people who have some specific characteristics. For instance, there are social activists out there who need to connect to key decision-makers because they have a strong message to carry. And there are people who were isolated from most other people around them because of stigmatization who just need to meet non-judgmental people. These, to me, are fine goals for someone to expand her or his first-degree network.

Some of it may have to do with introversion. While extraversion is a “dominant trait” of mine, I care deeply about people who consider themselves introverts, even when they start using it as a divisive label. In fact, that’s part of the reason I think it’d be neat to hold a ShyCamp. There’s a whole lot of room for human connection without having to rely on devices of outgoingness.

So, there are people who may benefit from expansion of their first-degree network. In this context, the “network effect” matters in a specific way. And if I think about “network maturity” in this case, there’s no evaluation involved, contrary to what it may seem like.

As you may have noticed, I keep insisting on the fact that we’re talking about “first-degree network.” Part of the reason is that I was lecturing about a few key network concepts just yesterday so, getting people to understand the difference between “the network as a whole” (especially on an online service) and “a given person’s first-degree network” is important to me. But another part relates back to what I’m getting to realize about Quora and Scribd: the process of connecting through an online service may have as much to do with collapsing some degrees of separation than with “being part of the same network.” To use Granovetter’s well-known terms, it’s about transforming “weak ties” into “strong” ones.

And I specifically don’t mean it as a “quality of interaction.” What is at stake, on Quora and Scribd, seems to have little to do with creating stronger bonds. But they may want to create closer links, in terms of network topography. In a way, it’s a bit like getting introduced on LinkedIn (and it corresponds to what biz-minded people mean by “networking”): you care about having “access” to that person, but you don’t necessarily care about her or him, personally.

There’s some sense in using such an approach on “utilitarian networks” like professional or Q&A ones (LinkedIn does both). But there are diverse ways to implement this approach and, to me, Quora and Scribd do it in a way which is very precisely counterproductive. The way LinkedIn does it is context-appropriate. So is the way Academia.edu does it. In both of these cases, the “transaction cost” of connecting with someone is commensurate with the degree of interaction which is possible. On Scribd and Quora, they almost force you to connect with “people you already know” and the “degree of interaction” which is imposed on users is disproportionately high (especially in Quora’s case, where a contact of yours can annoy you by asking you personally to answer a specific question). In this sense, joining Quora is a bit closer to being conscripted in a war while registering on Academia.edu is just a tiny bit more like getting into a country club. The analogies are tenuous but they probably get the point across. Especially since I get the strong impression that the “intimacy phase” has a lot to do with the “country club mentality.”

See, the social context in which these services gain much traction (relatively tech-savvy Anglophones in North America and Europe) assign very negative connotations to social exclusion but people keep being fascinating by the affordances of “select clubs” in terms of social capital. In other words, people may be very vocal as to how nasty it would be if some people had exclusive access to some influential people yet there’s what I perceive as an obsession with influence among the same people. As a caricature: “The ‘human rights’ movement leveled the playing field and we should never ever go back to those dark days of Old Boys’ Clubs and Secret Societies. As soon as I become the most influential person on the planet, I’ll make sure that people who think like me get the benefits they deserve.”

This is where the notion of elitism, as applied specifically to Quora but possibly expanding to other services, makes the most sense. “Oh, no, Quora is meant for everyone. It’s Democratic! See? I can connect with very influential people. But, isn’t it sad that these plebeians are coming to Quora without a proper knowledge of  the only right way to ask questions and without proper introduction by people I can trust? I hate these n00bz! Even worse, there are people now on the service who are trying to get social capital by promoting themselves. The nerve on these people, to invade my own dedicated private sphere where I was able to connect with the ‘movers and shakers’ of the industry.” No wonder Quora is so journalistic.

But I’d argue that there’s a part of this which is a confusion between first-degree networks and connection. Before Quora, the same people were indeed connected to these “influential people,” who allegedly make Quora such a unique system. After all, they were already online and I’m quite sure that most of them weren’t more than three or four degrees of separation from Quora’s initial userbase. But access to these people was difficult because connections were indirect. “Mr. Y Z, the CEO of Company X was already in my network, since there were employees of Company X who were connected through Twitter to people who follow me. But I couldn’t just coldcall CEO Z to ask him a question, since CEOs are out of reach, in their caves. Quora changed everything because Y responded to a question by someone ‘totally unconnected to him’ so it’s clear, now, that I have direct access to my good ol’ friend Y’s inner thoughts and doubts.”

As RMS might say, this type of connection is a “seductive mirage.” Because, I would argue, not much has changed in terms of access and whatever did change was already happening all over this social context.

At the risk of sounding dismissive, again, I’d say that part of what people find so alluring in Quora is “simply” an epiphany about the Small World phenomenon. With all sorts of fallacies caught in there. Another caricature: “What? It takes only three contacts for me to send something from rural Idaho to the head honcho at some Silicon Valley firm? This is the first time something like this happens, in the History of the Whole Wide World!”

Actually, I do feel quite bad about these caricatures. Some of those who are so passionate about Quora, among my contacts, have been very aware of many things happening online since the early 1990s. But I have to be honest in how I receive some comments about Quora and much of it sounds like a sudden realization of something which I thought was a given.

The fact that I feel so bad about these characterizations relates to the fact that, contrary to what I had planned to do, I’m not linking to specific comments about Quora. Not that I don’t want people to read about this but I don’t want anyone to feel targeted. I respect everyone and my characterizations aren’t judgmental. They’re impressionistic and, again, caricatures.

Speaking of what I had planned, beginning this post… I actually wanted to talk less about Quora specifically and more about other issues. Sounds like I’m currently getting sidetracked, and it’s kind of sad. But it’s ok. The show must go on.

So, other services…

While I had a similar experiences with Scribd and Quora about getting notifications of new connections from people with whom I haven’t had meaningful interactions, I’ve had a very different experience on many (probably most) other services.

An example I like is Foursquare. “Friendship requests” I get on Foursquare are mostly from: people with whom I’ve had relatively significant interactions in the past, people who were already significant parts of my second-degree network, or people I had never heard of. Sure, there are some people with whom I had tried to establish connections, including some who seem to reluctantly follow me on Quora. But the proportion of these is rather minimal and, for me, the stakes in accepting a friend request on Foursquare are quite low since it’s mostly about sharing data I already share publicly. Instead of being able to solicit my response to a specific question, the main thing my Foursquare “friends” can do that others can’t is give me recommendations, tips, and “notifications of their presence.” These are all things I might actually enjoy, so there’s nothing annoying about it. Sure, like any online service with a network component, these days, there are some “friend requests” which are more about self-promotion. But those are usually easy to avoid and, even if I get fooled by a “social media mar-ke-tor,” the most this person may do to me is give usrecommendation about “some random place.” Again, easy to avoid. So, the “social network” dimension of Foursquare seems appropriate, to me. Not ideal, but pretty decent.

I never really liked the “game” aspect and while I did play around with getting badges and mayorships in my first few weeks, it never felt like the point of Foursquare, to me. As Foursquare eventually became mainstream in Montreal and I was asked by a journalist about my approach to Foursquare, I was exactly in the phase when I was least interested in the game aspect and wished we could talk a whole lot more about the other dimensions of the phenomenon.

And I realize that, as I’m saying this, I may sound to some as exactly those who are bemoaning the shift out of the initial userbase of some cherished service. But there are significant differences. Note that I’m not complaining about the transition in the userbase. In the Foursquare context, “the more the merrier.” I was actually glad that Foursquare was becoming mainstream as it was easier to explain to people, it became more connected with things business owners might do, and generally had more impact. What gave me pause, at the time, is the journalistic hype surrounding Foursquare which seemed to be missing some key points about social networks online. Besides, I was never annoyed by this hype or by Foursquare itself. I simply thought that it was sad that the focus would be on a dimension of the service which was already present on not only Dodgeball and other location-based services but, pretty much, all over the place. I was critical of the seemingly unthinking way people approached Foursquare but the service itself was never that big a deal for me, either way.

And I pretty much have the same attitude toward any tool. I happen to have my favourites, which either tend to fit neatly in my “workflow” or otherwise have some neat feature I enjoy. But I’m very wary of hype and backlash. Especially now. It gets old very fast and it’s been going for quite a while.

Maybe I should just move away from the “tech world.” It’s the context for such hype and buzz machine that it almost makes me angry. [I very rarely get angry.] Why do I care so much? You can say it’s accumulation, over the years. Because I still care about social media and I really do want to know what people are saying about social media tools. I just wish discussion of these tools weren’t soooo “superlative”…

Obviously, I digress. But this is what I like to do on my blog and it has a cathartic effect. I actually do feel better now, thank you.

And I can talk about some other things I wanted to mention. I won’t spend much time on them because this is long enough (both as a blogpost and as a blogging session). But I want to set a few placeholders, for further discussion.

One such placeholder is about some pet theories I have about what worked well with certain services. Which is exactly the kind of thing “social media entrepreneurs” and journalists are so interested in, but end up talking about the same dimensions.

Let’s take Twitter, for instance. Sure, sure, there’s been a lot of talk about what made Twitter a success and probably-everybody knows that it got started as a side-project at Odeo, and blah, blah, blah. Many people also realize that there were other microblogging services around as Twitter got traction. And I’m sure some people use Twitter as a “textbook case” of “network effect” (however they define that effect). I even mention the celebrity dimensions of the “Twitter phenomenon” in class (my students aren’t easily starstruck by Bieber and Gaga) and I understand why journalists are so taken by Twitter’s “broadcast” mission. But something which has been discussed relatively rarely is the level of responsiveness by Twitter developers, over the years, to people’s actual use of the service. Again, we all know that “@-replies,” “hashtags,” and “retweets” were all emerging usage patterns that Twitter eventually integrated. And some discussion has taken place when Twitter changed it’s core prompt to reflect the fact that the way people were using it had changed. But there’s relatively little discussion as to what this process implies in terms of “developing philosophy.” As people are still talking about being “proactive” (ugh!) with users, and crude measurements of popularity keep being sold and bandied about, a large part of the tremendous potential for responsiveness (through social media or otherwise) is left untapped. People prefer to hype a new service which is “likely to have Twitter-like success because it has the features users have said they wanted in the survey we sell.” Instead of talking about the “get satisfaction” effect in responsiveness. Not that “consumers” now have “more power than ever before.” But responsive developers who refrain from imposing their views (Quora, again) tend to have a more positive impact, socially, than those which are merely trying to expand their userbase.

Which leads me to talk about Facebook. I could talk for hours on end about Facebook, but I almost feel afraid to do so. At this point, Facebook is conceived in what I perceive to be such a narrow way that it seems like anything I might say would sound exceedingly strange. Given the fact that it was part one of the first waves of Web tools with explicit social components to reach mainstream adoption, it almost sounds “historical” in timeframe. But, as so many people keep saying, it’s just not that old. IMHO, part of the implication of Facebook’s relatively young age should be that we are able to discuss it as a dynamic process, instead of assigning it to a bygone era. But, whatever…

Actually, I think part of the reason there’s such lack of depth in discussing Facebook is also part of the reason it was so special: it was originally a very select service. Since, for a significant period of time, the service was only available to people with email addresses ending in “.edu,” it’s not really surprising that many of the people who keep discussing it were actually not on the service “in its formative years.” But, I would argue, the fact that it was so exclusive at first (something which is often repeated but which seems to be understood in a very theoretical sense) contributed quite significantly to its success. Of course, similar claims have been made but, I’d say that my own claim is deeper than others.

[Bang! I really don’t tend to make claims so, much of this blogpost sounds to me as if it were coming from somebody else…]

Ok, I don’t mean it so strongly. But there’s something I think neat about the Facebook of 2005, the one I joined. So I’d like to discuss it. Hence the placeholder.

And, in this placeholder, I’d fit: the ideas about responsiveness mentioned with Twitter, the stepwise approach adopted by Facebook (which, to me, was the real key to its eventual success), the notion of intimacy which is the true core of this blogpost, the notion of hype/counterhype linked to journalistic approaches, a key distinction between privacy and intimacy, some non-ranting (but still rambling) discussion as to what Google is missing in its “social” projects, anecdotes about “sequential network effects” on Facebook as the service reached new “populations,” some personal comments about what I get out of Facebook even though I almost never spent any significant amount of time on it, some musings as to the possibility that there are online services which have reached maturity and may remain stable in the foreseeable future, a few digressions about fanboism or about the lack of sophistication in the social network models used in online services, and maybe a bit of fun at the expense of “social media expert marketors”…

But that’ll be for another time.

Cheers!

Présence féminine et culture geek (Journée Ada Lovelace) #ald09

En 2009, la journée de la femme a été hypothéquée d’une heure, dans certaines contrées qui sont passées à l’heure d’été le 8 mars. Pourtant, plus que jamais, c’est aux femmes que nous devrions accorder plus de place. Cette Journée internationale en l’honneur d’Ada Lovelace et des femmes dans les domaines technologiques est une excellente occasion pour discuter de l’importance de la présence féminine pour la pérennité sociale.

Pour un féministe mâle, le fait de parler de condition féminine peut poser certains défis. Qui suis-je, pour parler des femmes? De quel droit pourrais-je m’approprier de la parole qui devrait, selon moi, être accordée aux femmes? Mes propos ne sont-ils pas teintés de biais? C’est donc d’avantage en tant qu’observateur de ce que j’ai tendance à appeler la «culture geek» (voire la «niche geek» ou la «foule geek») que je parle de cette présence féminine.

Au risque de tomber dans le panneau du stéréotype, j’oserais dire qu’une présence accrue des femmes en milieu geek peut avoir des impacts intéressants en fonction de certains rôles impartis aux femmes dans diverses sociétés liées à la culture geek. En d’autres termes, j’aimerais célébrer le pouvoir féminin, bien plus fondamntal que la «force» masculine.

Je fais en cela référence à des notions sur les femmes et les hommes qui m’ont été révélées au cours de mes recherches sur les confréries de chasseurs, au Mali. En apparence exclusivement mâles, les confréries de chasseurs en Afrique de l’ouest accordent une place prépondérante à la féminité. Comme le dit le proverbe, «nous sommes tous dans les bras de nos mères» (bèè y’i ba bolo). Si le père, notre premier rival (i fa y’i faden folo de ye), peut nous donner la force physique, c’est la mère qui nous donne la puissance, le vrai pouvoir.

Loin de moi l’idée d’assigner aux femmes un pouvoir qui ne viendrait que de leur capacité à donner naissance. Ce n’est pas uniquement en tant que mère que la femme se doit d’être respectée. Bien au contraire, les divers rôles des femmes ont tous à être célébrés. Ce qui donne à la maternité une telle importance, d’un point de vue masculin, c’est son universalité: un homme peut ne pas avoir de sœur, d’épouse ou de fille, il peut même ne pas connaître l’identité précise de son père, il a au minimum eu un contact avec sa mère, de la conception à la naissance.

C’est souvent par référence à la maternité que les hommes conçoivent le respect le plus inconditionnel pour la femme. Et l’image maternelle ne doit pas être négligée, même si elle est souvent stéréotypée. Même si le terme «materner» a des connotations péjoratives, il fait appel à un soi adapté et sans motif spécifique. La culture geek a-t-elle besoin de soins maternels?

Une étude récente s’est penchée sur la dimension hormonale des activités des courtiers de Wall Street, surtout en ce qui a trait à la prise de risques. Selon cette étude (décrite dans une baladodiffusion de vulgarisation scientifique), il y aurait un lien entre certains taux d’hormones et un comportement fondé sur le profit à court terme. Ces hormones sont surtout présentes chez de jeunes hommes, qui constituent la majorité de ce groupe professionnel. Si les résultats de cette étude sont valables, un groupe plus diversifié de courtiers, au niveau du sexe et de l’âge, risque d’être plus prudent qu’un groupe dominé par de jeunes hommes.

Malgré d’énormes différences dans le détail, la culture geek a quelques ressemblances avec la composition de Wall Street, du moins au point de vue hormonal. Si l’appât du gain y est moins saillant que sur le plancher de la Bourse, la culture geek accorde une très large place au culte méritocratique de la compétition et à l’image de l’individu brillant et tout-puissant. La prise de risques n’est pas une caractéristique très visible de la culture geek, mais l’approche «résolution de problèmes» (“troubleshooting”) évoque la décision hâtive plutôt que la réflexion approfondie. Le rôle du dialogue équitable et respectueux, sans en être évacué, n’y est que rarement mis en valeur. La culture geek est «internationale», en ce sens qu’elle trouve sa place dans divers lieux du Globe (généralement définis avec une certaine précision en cebuees névralgiques comme la Silicon Valley). Elle est pourtant loin d’être représentative de la diversité humaine. La proportion bien trop basse de femmes liées à la culture geek est une marque importante de ce manque de diversité. Un groupe moins homogène rendrait plus prégnante la notion de coopération et, avec elle, un plus grand soucis de la dignité humaine. Après tout, le vrai humanisme est autant philogyne que philanthrope.

Un principe similaire est énoncé dans le cadre des soins médicaux. Sans être assignées à des tâches spécifiques, associées à leur sexe, la présence de certaines femmes-médecins semble améliorer certains aspects du travail médical. Il y a peut-être un stéréotype implicite dans tout ça et les femmes du secteur médical ne sont probablement pas traitées d’une bien meilleure façon que les femmes d’autres secteurs d’activité. Pourtant, au-delà du stéréotype, l’association entre féminité et relation d’aide semble se maintenir dans l’esprit des membres de certaines sociétés et peut être utilisée pour rendre la médecine plus «humaine», tant dans la diversité que dans cette notion d’empathie raisonnée, évoquée par l’humanisme.

Je ne peux m’empêcher de penser à cette remarquable expérience, il y a quelques années déjà, de participer à un colloque académique à forte présence féminine. En plus d’une proportion élevée de femmes, ce colloque sur la nourriture et la culture donnait la part belle à l’image de la mère nourricière, à l’influence fondamentale de la sphère donestique sur la vie sociale. Bien que mâle, je m’y suis senti à mon aise et je garde de ces quelques jours l’idée qu’un monde un tant soit peu féminisé pouvait avoir des effets intéressants, d’un point de vue social. Un groupe accordant un réel respect à la condition féminine peut être associé à une ambiance empreinte de «soin», une atmosphère “nurturing”.

Le milieu geek peut être très agréable, à divers niveaux, mais la notion de «soin», l’empathie, voire même l’humanisme n’en sont pas des caractéristiques très évidentes. Un monde geek accordant plus d’importance à la présence des femmes serait peut-être plus humain que ce qu’un portrait global de la culture geek semble présager.

Et n’est-ce pas ce qui s’est passé? Le ‘Net s’est partiellement féminisé au cours des dix dernières années et l’émergence du média social est intimement lié à cette transformation «démographique».

D’aucuns parlent de «démocratisation» d’Internet, usant d’un champ lexical associé au journalisme et à la notion d’État-Nation. Bien qu’il s’agisse de parler d’accès plus uniforme aux moyens technologiques, la source de ce discours se situe dans une vision spécifique de la structure social. Un relent de la Révolution Industrielle, peut-être? Le ‘Net étant construit au-delà des frontières politiques, cette vision du monde semble peu appropriée à la communication mondialisée. D’ailleurs, qu’entend-on vraiment par «démocratisation» d’Internet? La participation active de personnes diversifiées aux processus décisionnels qui créent continuellement le ‘Net? La simple juxtaposition de personnes provenant de milieux socio-économiques distincts? La possibilité pour la majorité de la planète d’utiliser certains outils dans le but d’obtenir ces avantages auxquels elle a droit, par prérogative statistique? Si c’est le cas, il en reviendrait aux femmes, majoritaires sur le Globe, de décider du sort du ‘Net. Pourtant, ce sont surtout des hommes qui dominent le ‘Net. Le contrôle exercé par les hommes semble indirect mais il n’en est pas moins réel.

Cet état des choses a tendance à changer. Bien qu’elles ne soient toujours pas dominantes, les femmes sont de plus en plus présentes, en-ligne. Certaines recherches statistiques semblent d’ailleurs leur assigner la majorité dans certaines sphères d’activité en-ligne. Mais mon approche est holistique et qualitative, plutôt que statistique et déterministe. C’est plutôt au sujet des rôles joués par les femmes que je pense. Si certains de ces rôles semblent sortir en ligne direct du stéréotype d’inégalité sexuelle du milieu du XXè siècle, c’est aussi en reconnaissant l’emprise du passé que nous pouvons comprendre certaines dimensions de notre présent. Les choses ont changé, soit. La conscience de ce changement informe certains de nos actes. Peu d’entre nous ont complètement mis de côté cette notion que notre «passé à tous» était patriarcal et misogyne. Et cette notion conserve sa signifiance dans nos gestes quotidiens puisque nous nous comparons à un modèle précis, lié à la domination et à la lutte des classes.

Au risque, encore une fois, de faire appel à des stéréotypes, j’aimerais parler d’une tendance que je trouve fascinante, dans le comportement de certaines femmes au sein du média social. Les blogueuses, par exemple, ont souvent réussi à bâtir des communautés de lectrices fidèles, des petits groupes d’amies qui partagent leurs vies en public. Au lieu de favoriser le plus grand nombre de visites, plusieurs femmes ont fondé leurs activités sur la blogosphère sur des groupes relativement restreints mais très actifs. D’ailleurs, certains blogues de femmes sont l’objet de longues discussions continues, liant les billets les uns aux autres et, même, dépassant le cadre du blogue.

À ce sujet, je fonde certaines de mes idées sur quelques études du phénomène de blogue, parues il y a déjà plusieurs années (et qu’il me serait difficile de localiser en ce moment) et sur certaines observations au sein de certaines «scènes geeks» comme Yulblog. Lors de certains événements mettant en contacts de nombreuses blogueuses, certaines d’entre elles semblaient préférer demeurer en groupe restreint pour une part importante de la durée de l’événement que de multiplier les nouveaux contacts. Il ne s’agit pas ici d’une restriction, certaines femmes sont mieux à même de provoquer l’«effet du papillon social» que la plupart des hommes. Mais il y a une force tranquille dans ces petits regroupements de femmes, qui fondent leur participation à la blogosphère sur des contacts directs et forts plutôt que sur la «pêche au filet». C’est souvent par de très petits groupes très soudés que les changements sociaux se produisent et, des “quilting bees” aux blogues de groupes de femmes, il y a une puissance ignorée.

Il serait probablement abusif de dire que c’est la présence féminine qui a provoqué l’éclosion du média social au cours des dix dernières années. Mais la présence des femmes est liée au fait que le ‘Net ait pu dépasser la «niche geek». Le domaine de ce que certains appellent le «Web 2.0» (ou la sixième culture d’Internet) n’est peut-être pas plus démocratique que le ‘Net du début des années 1990. Mais il est clairement moins exclusif et plus accueillant.

Comme ma tendre moitié l’a lu sur la devanture d’une taverne: «Bienvenue aux dames!»

Les billets publiés en l’honneur de la Journée Ada Lovelace devaient, semble-t-il, se pencher sur des femmes spécifiques, œuvrant dans des domaines technologiques. J’ai préféré «réfléchir à plume haute» au sujet de quelques éléments qui me trottaient dans la tête. Il serait toutefois de bon ton pour moi de mentionner des noms et de ne pas consigner ce billet à une observation purement macroscopique et impersonnelle. Étant peu porté sur l’individualisme, je préfère citer plusieurs femmes, plutôt que de me concentrer sur une d’entre elles. D’autant plus que la femme à laquelle je pense avec le plus d’intensité dit désirer garder une certaine discrétion et, même si elle blogue depuis bien plus longtemps que moi et qu’elle sait très bien se débrouiller avec les outils en question, elle prétend ne pas être associée à la technologie.

J’ai donc décidé de procéder à une simple énumération (alphabétique, j’aime pas les rangs) de quelques femmes dont j’apprécie le travail et qui ont une présence Internet facilement identifiable. Certaines d’entre elles sont très proches de moi. D’autres planent au-dessus de milieux auxquels je suis lié. D’autres encore sont des présences discrètes ou fortes dans un quelconque domaine que j’associe à la culture geek et/ou au média social. Évidemment, j’en oublie des tonnes. Mais c’est un début. Continuons le combat! 😉

La Renaissance du café à Montréal

J’ai récemment publié un très long billet sur la scène du café à Montréal. Sans doûte à cause de sa longueur, ce billet ne semble pas avoir les effets escomptés. J’ai donc décidé de republier ce billet, section par section. Ce billet est la dernière section de ce long billet. Il consiste en une espèce de résumé de la situation actuelle de la scène montréalaise du café, avec un regard porté vers son avenir. Vous pouvez consulter l’introduction qui contient des liens aux autres sections et ainsi avoir un contexte plus large.

À mon humble avis, l’arrivée de la Troisième vague à Montréal nous permet maintenant d’explorer le café dans toute sa splendeur. En quelque sorte, c’était la pièce qui manquait au casse-tête.

Dans mon précédent billet, j’ai omis de comparer le café à l’italienne au café à la québécoise (outre l’importance de l’allongé). C’est en partie parce que les différences sont un peu difficile à expliquer. Mais disons qu’il y a une certaine diversité de saveurs, à travers la dimension «à la québécoise» de la scène montréalaise du café. Malgré certains points communs, les divers cafés de Montréalais n’ont jamais été d’une très grande homogénéité, au niveau du goût. Les ressemblances venaient surtout de l’utilisation des quelques maisons de torréfaction locales plutôt que d’une unité conceptuelle sur la façon de faire le café. D’ailleurs, j’ai souvent perçu qu’il y avait eu une baisse de diversité dans les goûts proposés par différents cafés montréalais au cours des quinze dernières années, et je considère ce processus de quasi-standardisation (qui n’a jamais été menée à terme) comme un aspect néfaste de cette période dans l’histoire du café à Montréal. Les nouveaux développements de la scène montréalaise du café me donne espoir que la diversité de cette scène grandit de nouveau après cette période de «consolidation».

D’ailleurs, c’est non sans fierté que je pense au fait que les grandes chaînes «étrangères» de cafés ont eu de la difficulté à s’implanter à Montréal. Si Montréal n’a eu sa première succursale Starbucks qu’après plusieurs autres villes nord-américaines et si Second Cup a rapidement dû fermer une de ses succursales montréalaises, c’est entre autres parce que la scène montréalaise du café était très vivante, bien avant l’arrivée des chaînes. D’ailleurs, plusieurs chaînes se sont développé localement avant de se disperser à l’extérieur de Montréal. Le résultat est qu’il y a probablement, à l’heure actuelle, autant sinon plus de succursales de chaînes de cafés à Montréal que dans n’importe autre grande ville, mais qu’une proportion significative de ces cafés est originaire de Montréal. Si l’existence de chaînes locales de cafés n’a aucune corrélation avec la qualité moyenne du café qu’on dans une région donnée (j’ai même tendance à croire qu’il y a une corrélation inverse entre le nombre de chaînes et la qualité moyenne du café), la «conception montréalaise» du café me semble révêlée par les difficultés rencontrées par les chaînes extrogènes.

En fait, une caractéristique de la scène du café à Montréal est que la diversité est liée à la diversité de la population. Non seulement la diversité linguistique, culturelle, ethnique et sociale. Mais la diversité en terme de goûts et de perspectives. La diversité humaine à Montréal évoque l’image de la «salade mixte»: un mélange harmonieux mais avec des éléments qui demeurent distincts. D’aucuns diront que c’est le propre de toute grande ville, d’être intégrée de la sorte. D’autres diront que Montréal est moins bien intégrée que telle ou telle autre grande ville. Mais le portrait que j’essaie de brosser n’est ni plus beau, ni plus original que celui d’une autre ville. Il est simplement typique.

Outre les cafés «à la québécoise», «à l’italienne» et «troisième vague» que j’ai décrits, Montréal dispose de plusieurs cafés qui sont liés à diverses communautés. Oui, je pense à des cafés liés à des communautés culturelles, comme un café guatémaltèque ou un café libanais. Mais aussi à des cafés liés à des groupes sociaux particuliers ou à des communautés religieuses. Au point de vue du goût, le café servi à ces divers endroits n’est peut-être pas si distinctif. Mais l’expérience du café prend un sens spécifique à chacun de ces endroits.

Et si j’ai parlé presqu’exclusivement de commerces liés au café, je pense beaucoup à la dimension disons «domestique» du café.

Selon moi, la population de la région montréalaise a le potentiel d’un réel engouement pour le café de qualité. Même s’ils n’ont pas toujours une connaissance très approfondie du café et même s’il consomme du café de moins bonne qualité, plusieurs Montréalais semblent très intéressés par le café. Certains d’entre eux croient connaître le café au point de ne pas vouloir en découvrir d’autres aspects. Mais les discussions sur le goût du café sont monnaie courante parmi des gens de divers milieux, ne serait-ce que dans le choix de certains cafés.

Évidemment, ces discussions ont lieu ailleurs et le café m’a souvent aidé à m’intégrer à des réseaux sociaux de villes où j’ai habité. Mais ce que je crois être assez particulier à Montréal, c’est qu’il ne semble pas y avoir une «idéologie dominante» du café. Certains amateurs de café (et certains professionnels du café) sont très dogmatiques, voire doctrinaires. Mais je ne perçois aucune  idée sur le café qui serait réellement acquise par tous. Il y a des Tim Hortons et des Starbucks à Montréal mais, contrairement à d’autres coins du continent, il ne semble pas y avoir un café qui fait consensus.

Par contre, il y a une sorte de petite oligarchie. Quelques maisons de torréfaction et de distribution du café semblent avoir une bonne part du marché. Je pense surtout à Union, Brossard et Van Houtte (qui a aussi une chaîne de café et qui était pris à une certaine époque comme exemple de succès financier). À ce que je sache, ces trois entreprises sont locales. À l’échelle globale, l’oligarchie du monde du café est constituée par Nestlé, Sara Lee, Kraft et Proctor & Gamble. J’imagine facilement que ces multinationales ont autant de succès à Montréal qu’ailleurs dans le monde mais je trouve intéressant de penser au poids relatif de quelques chaînes locales.

Parlant de chaînes locales, je crois que certaines entreprises locales peuvent avoir un rôle déterminant dans la «Renaissance du café à Montréal». Je pense surtout à Café Terra de Carlo Granito, à Café Mystique et Toi, Moi & Café de Sevan Istanboulian, à Café Rico de Sévanne Kordahi et à la coop La Maison verte à Notre-Dame-de-Grâce. Ces choix peuvent sembler par trop personnels, voire arbitraires. Mais chaque élément me semble représentatif de la scène montréalaise du café. Carlo Granito, par exemple, a participé récemment à l’émission Samedi et rien d’autre de Radio-Canada, en compagnie de Philippe Mollé (audio de 14:30 à 32:30). Sevan Istanboulian est juge certifié du World Barista Championship et distribue ses cafés à des endroits stratégiques. Sévanne Kordahi a su concentrer ses activités dans des domaines spécifiques et ses cafés sont fort appréciés par des groupes d’étudiants (entre autres grâce à un rabais étudiant). Puis j’ai appris dernièrement que La Maison verte servait du Café Femenino qui met de l’avant une des plus importantes dimensions éthiques du monde du café.

Pour revenir au «commun des mortels», l’amateur de café. Au-delà de la spécificité locale, je crois qu’une scène du café se bâtit par une dynamique entre individus, une série de «petites choses qui finissent par faire une différence». Et c’est cette dynamique qui me rend confiant.

La communauté des enthousiastes du café à Montréal est somme toute assez petite mais bien vivante. Et je me place dans les rangs de cette communauté.

Certains d’entre nous avons participé à divers événements ensemble, comme des dégustations et des séances de préparation de café. Les discussions à propos du café se multiplient, entre nous. D’ailleurs, nous nous croisons assez régulièrement, dans l’un ou l’autre des hauts lieux du café à Montréal. D’ailleurs, d’autres dimensions du monde culinaire sont représentés parmi nous, depuis la bière artisanale au végétalianisme en passant par le chocolat et le thé. Ces liens peuvent sembler évident mais c’est surtout parce que chacun d’entre nous fait partie de différents réseaux que la communauté me semble riche. En discutant ensemble, nous en venons à parler de plusieurs autres arts culinaires au-delà du café, ce qui renforce les liens entre le café et le reste du monde culinaire. En parlant de café avec nos autres amis, nous créons un effet de vague, puisque nous participons à des milieux distincts. C’est d’ailleurs une représentation assez efficace de ce que je continue d’appeler «l’effet du papillon social»: le battement de ses ailes se répercute dans divers environnements. Si la friction n’est pas trop grande, l’onde de choc provenant de notre communauté risque de se faire sentir dans l’ensemble de la scène du café à Montréal.

Pour boucler la boucle (avant d’aller me coucher), je dois souligner le fait que, depuis peu, le lieu de rencontre privilégié de notre petit groupe d’enthousiastes est le Café Myriade.

Café à la montréalaise

Montréal est en passe de (re)devenir une destination pour le café. Mieux encore, la «Renaissance du café à Montréal» risque d’avoir des conséquences bénéfiques pour l’ensemble du milieu culinaire de la métropole québécoise.

Cette thèse peut sembler personnelle et je n’entends pas la proposer de façon dogmatique. Mais en me mêlant au milieu du café à Montréal, j’ai accumulé un certain nombre d’impressions qu’il me ferait plaisir de partager. Il y a même de la «pensée magique» dans tout ça en ce sens qu’il me semble plus facile de rebâtir la scène montréalaise du café si nous avons une idée assez juste de ce qui constitue la spécificité montréalaise.

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Microblogue d'événement

Version éditée d’un message que je viens d’envoyer à mon ami Martin Lessard.

Le contexte direct, c’est une discussion que nous avons eue au sujet de mon utilisation de Twitter, la principale plateforme de microblogue. Pendant un événement quelconque (conférence, réunion, etc.), j’utilise Twitter pour faire du blogue en temps réel, du liveblogue.

Contrairement à certains, je pense que l’utilisation du microblogue peut être adaptée aux besoins de chaque utilisateur. D’ailleurs, c’est un aspect de la technologie que je trouve admirable: la possibilité d’utiliser des outils pour d’autres usages que ceux pour lesquels ils ont été conçus. C’est là que la technologie au sens propre dépasse l’outil. Dans mon cours de culture matérielle, j’appelle ça “unintended uses”, concept tout simple qui a beaucoup d’implications en rapport aux liens sociaux dans la chaîne qui va de la conception et de la construction d’un outil jusqu’à son utilisation et son «impact» social.

Donc, mon message édité.
Je pense pas mal à cette question de tweets («messages» sur Twitter) considérés comme intempestifs. Alors je lance quelques idées.

Ça m’apporte pas mal, de bloguer en temps réel par l’entremise de Twitter. Vraiment, je vois ça comme prendre des notes en public. Faut dire que la prise de notes est une seconde nature, pour moi. C’est comme ça que je structure ma pensée. Surtout avec des “outliners” mais ça marche aussi en linéaire.

De ce côté, je fais un peu comme ces journalistes sur Twitter qui utilisent le microblogue comme carnet de notes. Andy Carvin est mon exemple préféré. Il tweete plus vite que moi et ses tweets sont aussi utiles qu’un article de journal. Ma démarche est plus proche de la «lecture active» et du sens critique, mais c’est un peu la même idée. Dans mon cas, ça me permet même de remplacer un billet de blogue par une série de tweets.

L’avantage de la prise de notes en temps réel s’est dévoilé entre autres lors d’une présentation de Johannes Fabian, anthropologue émérite qui était à Montréal pendant une semaine bien remplie, le mois dernier. Je livebloguais sa première présentation, sur Twitter. En face de moi, il y avait deux anthropologues de Concordia (Maximilian Forte et Owen Wiltshire) que je connais entre autres comme blogueurs. Les deux prenaient des notes et l’un d’entre eux enregistrait la séance. Dans mes tweets, j’ai essayé de ne pas trop résumer ce que Fabian disait mais je prenais des notes sur mes propres réactions, je faisais part de mes observations de l’auditoire et je réfléchissais à des implications des idées énoncées. Après la présentation, Maximilian me demandait si j’allais bloguer là-dessus. J’ai pu lui dire en toute franchise que c’était déjà fait. Et Owen, un de mes anciens étudiants qui travaille maintenant sur la publication académique et le blogue, a maintenant accès à mes notes complètes, avec “timeline”.
Puissante méthode de prise de notes!

L’avantage de l’aspect public c’est premièrement que je peux avoir des «commentaires» en temps réel. J’en ai pas autant que j’aimerais, mais ça reste ce que je cherche, les commentaires. Le microbloguage me donne plus de commentaires que mon blogue principal, ici même sur WordPress. Facebook me donne plus de commentaires que l’un ou l’autre, mais c’est une autre histoire.

Dans certains cas, le livebloguage donne lieu à une véritable conversation parallèle. Mon exemple préféré, c’est probablement cette interaction que j’ai eue avec John Milles à la fin de la session d’Isabelle Lopez, lors de PodCamp Montréal (#pcmtl08). On parlait de culture d’Internet et je proposais qu’il y avait «une» culture d’Internet (comme on peut dire qu’il y a «une» culture chrétienne, disons). Milles, qui ne me savait pas anthropologue, me fait alors un tweet à propos de la notion classique de culture pour les anthropologues (monolithique, spécifiée dans l’espace, intemporelle…). J’ai alors pu le diriger vers la «crise de la représentation» en anthropologie depuis 1986 avec Writing Culture de Clifford et Marcus. Il m’a par la suite envoyé des références de la littérature juridique.

Bien sûr, c’est l’idée du “backchannel” appliqué au ‘Net. Ça fonctionne de façon très efficace pour des événements comme SXSW et BarCamp puisque tout le monde tweete en même temps. Mais ça peut fonctionner pour d’autres événements, si la pratique devient plus commune.

More on this later.”

Je crois que le bloguage en temps réel lors d’événements augmente la visibilité de l’événement lui-même. Ça marcherait mieux si je mettais des “hashtags” à chaque tweet. (Les “hashtags” sont des étiquettes textuelles précédées de la notation ‘#’, qui permettent d’identifier des «messages»). Le problème, c’est que c’est pas vraiment pratique de taper des hashtags continuellement, du moins sur un iPod touch. De toutes façons, ce type de redondance semble peu utile.

More on this later.”

Évidemment, le fait de microbloguer autant augmente un peu ma propre visibilité. Ces temps-ci, je commence à penser à des façons de me «vendre». C’est un peu difficile pour moi parce que j’ai pas l’habitude de me vendre et que je vois l’humilité comme une vertu. Mais ça semble nécessaire et je me cherche des moyens de me vendre tout en restant moi-même. Twitter me permet de me mettre en valeur dans un contexte qui rend cette pratique tout à fait appropriée (selon moi).

D’ailleurs, j’ai commencé à utiliser Twitter comme méthode de réseautage, pendant que j’étais à Austin. C’était quelques jours avant SXSW et je voulais me faire connaître localement. D’ailleurs, je conserve certaines choses de cette époque, y compris des contacts sur Twitter.

Ma méthode était toute simple: je me suis mis à «suivre» tous ceux qui suivaient @BarCampAustin. Ça faisait un bon paquet et ça me permettait de voir ce qui se passait. D’ailleurs, ça m’a permis d’aller observer des événements organisés par du monde de SXSW comme Gary Vaynerchuk et Scott Beale. Pour un ethnographe, y’a rien comme voir Kevin Rose avec son «entourage» ou d’apprendre que Dr. Tiki est d’origine lavalloise. 😉

Dans les “features” du microbloguage que je trouve particulièrement intéressantes, il y a les notations en ‘@’ et en ‘#’. Ni l’une, ni l’autre n’est si pratique sur un iPod touch, du moins avec les applis qu’on a. Mais le concept de base est très intéressant. Le ‘@’ est un peu l’équivalent du ping ou trackback, pouvant servir à attirer l’attention de quelqu’un d’autre (cette notation permet les réponses directes à des messages). C’est assez puissant comme principe et ça aide beaucoup dans le livebloguage (Muriel Ide et Martin Lessard ont utilisé cette méthode pour me contacter pendant WebCom/-Camp).

More on this later.”

D’après moi, avec des geeks, cette pratique du microblogue d’événement s’intensifie. Il prend même une place prépondérante, donnant au microblogue ce statut que les journalistes ont tant de difficulté à saisir. Lorsqu’il se passe quelque-chose, le microblogue est là pour couvrir l’événement.

Ce qui m’amène à ce “later“. Tout simple, dans le fond. Des instances de microblogues pour des événements. Surtout pour des événements préparés à l’avance, mais ça peut être une structure ad hoc à la Ushahidi d’Erik Hersman.

Laconica d’Evan Prodromou est tout désigné pour remplir la fonction à laquelle je pense mais ça peut être sur n’importe quelle plateforme. J’aime bien Identi.ca, qui est la plus grande instance Laconica. Par contre, j’utilise plus facilement Twitter, entre autres parce qu’il y a des clients Twitter pour l’iPod touch (y compris avec localisation).

Imaginons une (anti-)conférence à la PodCamp. Le même principe s’applique aux événements en-ligne (du genre “WebConference”) mais les rencontres face-à-face ont justement des avantages grâce au microbloguage. Surtout si on pense à la “serendipity”, à l’utilisation de plusieurs canaux de communication (cognitivement moins coûteuse dans un contexte de coprésence), à la facilité des conversations en petits groupes et au «langage non-verbal».

Donc, chaque événement a une instance de microblogue. Ça coûte pratiquement rien à gérer et ça peut vraiment ajouter de la valeur à l’événement.

Chaque personne inscrite à l’événement a un compte de microblogue qui est spécifique à l’instance de cet événement (ou peut utiliser un compte Laconica d’une autre instance et s’inscrire sur la nouvelle instance). Par défaut, tout le monde «suit» tout le monde (tout le monde est incrit pour voir tous les messages). Sur chaque “nametag” de la conférence, l’identifiant de la personne apparaît. Chaque présentateur est aussi lié à son identifiant. Le profil de chaque utilisateur peut être calqué sur un autre profil ou créé spécifiquement pour l’événement. Les portraits photos sont privilégiés, mais les avatars sont aussi permis. Tout ce qui est envoyé à travers l’instance est archivé et catalogué. S’il y a des façons de spécifier des positions dans l’espace, de façon précise (peut-être même avec une RFID qu’on peut désactiver), ce positionnement est inscrit dans l’instance. Comme ça, on peut se retrouver plus facilement pour discuter en semi-privé. D’ailleurs, ça serait facile d’inclure une façon de prendre des rendez-vous ou de noter des détails de conversations, pour se remémorer le tout plus tard. De belles intégrations possibles avec Google Calendar, par exemple.

Comme la liste des membres de l’instance est limitée, on peut avoir une appli qui facilite les notations ‘@’. Recherche «incrémentale», carnet d’adresse, auto-complétion… Les @ des présentateurs sont sous-entendus lors des présentations, on n’a pas à taper leurs noms au complet pour les citer. Dans le cas de conversations à plusieurs, ça devient légèrement compliqué, mais on peut quand même avoir une liste courte si c’est un panel ou d’autres méthodes si c’est plus large. D’ailleurs, les modérateurs pourraient utiliser ça pour faire la liste d’attente des interventions. (Ça, c’est du bonbon! J’imagine ce que ça donnerait à L’Université autrement!)

Comme Evan Prodromou en parlait lors de PodCamp Montréal, il y a toute la question du “microcasting” qui prend de l’ampleur. Avec une instance de microblogue liée à un événement, on pourrait avoir de la distribution de fichiers à l’interne. Fichiers de présentation (Powerpoint ou autre), fichiers médias, liens, etc. Les présentateurs peuvent préparer le tout à l’avance et envoyer leurs trucs au moment opportun. À la rigueur, ça peut même remplacer certaines utilisations de Powerpoint!

Plutôt que de devoir taper des hashtags d’événements (#pcmtl08), on n’a qu’à envoyer ses messages sur l’instance spécifique. Ceux qui ne participent pas à l’événement ne sont pas inondés de messages inopportuns. Nul besoin d’arrêter de suivre quelqu’un qui participe à un tel événement (comme ç’a été le cas avec #pcmtl08).

Une fois l’événement terminé, on peut faire ce qu’on veut avec l’instance. On peut y revenir, par exemple pour consulter la liste complète des participants. On peut retravailler ses notes pour les transformer en billets et même rapports. Ou on peut tout mettre ça de côté.

Pour le reste, ça serait comme l’utilisation de Twitter lors de SXSWi (y compris le cas Lacy, que je trouve fascinant) ou autre événement geek typique. Dans certains cas, les gens envoient les tweets directement sur des écrans autour des présentateurs.

Avec une instance spécifique, les choses sont plus simple à gérer. En plus, peu de risques de voir l’instance tomber en panne, comme c’était souvent le cas avec Twitter, pendant une assez longue période.

C’est une série d’idées en l’air et je tiens pas au détail spécifique. Mais je crois qu’il y a un besoin réel et que ça aide à mettre plusieurs choses sur une même plateforme. D’ailleurs, j’y avais pas trop pensé mais ça peut avoir des effets intéressants pour la gestion de conférences, pour des rencontres en-ligne, pour la couverture médiatique d’événements d’actualités, etc. Certains pourraient même penser à des modèles d’affaire qui incluent le microblogue comme valeur ajoutée. (Différents types de comptes, possibilité d’assister gratuitement à des conférences sans compte sur l’instance…)

Qu’en pensez-vous?

Ce que mes amis sont devenus

Quelques anciens de Notre-Dame-de-PontmainOn a bien vieilli!
Quelques anciens de Notre-Dame-de-Pontmain

C’est-tu pas une belle gang, ça? Nous étions quelques anciens de l’école primaire Notre-Dame-de-Pontmain de Laval à bruncher ensemble en ce dimanche, 26 octobre 2008. Une journée à marquer d’une pierre blanche.

via Facebook | Photos de Notre-Dame-de-Pontmain

Il y a quelque-chose de profond dans le fait de revoir des amis d’enfance. Vraiment. C’est un peu difficile à verbaliser, mais ça se comprend bien.

Il y a un peu plus d’un an, je me demandais ce que mes amis étaient devenus. Je cherchais alors à contacter quelques personnes pour les inviter à mon anniversaire de mariage. C’est d’ailleurs en préparant cet anniversaire que j’ai parcouru des réseaux d’anciens. Suite à cet anniversaire, j’ai manifesté ma fierté d’avoir des amis si fascinants. Aujourd’hui, je souhaite de nouveau célébrer l’amitié.

Pour un papillon social, c’est pas très surprenant. J’aime entrer en contact avec les gens, que je les aie connus plus tôt ou non. Que voulez-vous, j’aime le monde. Tel que mentionné dans un billet précédent, je me suis autrefois senti ostracisé. Je sais pas s’il y a une causalité entre mon identité comme papillon social et mon enfance, mais je trouve que c’est un pattern intéressant: le type porté vers les autres, qui passe une enfance plutôt solitaire, devient un papillon social à l’âge adulte. L’image de la «chenille sociale» est assez forte aussi!

Outre la publication de cette photo, ce qui me motive à écrire ce billet c’est Facebook. Si si! Parce que ce petit groupe d’anciens poursuit la discussion. Parce qu’on se «retrouve», dans un sens très profond, grâce à Facebook. Et parce que j’ai revisité ma liste d’amis sur Facebook et je suis encore plus fier.

Voyez-vous, je créais une «liste d’amis» sur Facebook, pour ces anciens du primaire. Cette fonction de liste d’amis sur Facebook est un peu limitée mais elle peut être utile si, comme tout semble l’indiquer, notre groupe d’anciens décide d’organiser d’autres événements. Pour organiser le brunch, j’ai fait parvenir une invitation à tous les membres du groupe Facebook des anciens de notre école alors que j’aurais mieux fait de cibler ceux de ma «cohorte». C’est un petit détail pratique, mais ça m’a permis de réfléchir.

Parce qu’en créant cette liste d’amis, je me suis rendu compte à quel point j’ai une idée assez précise de ce qui me lie à chacun de mes contacts sur Facebook. Dans ce cas-ci, j’ai rapidement pu sélectionner ceux que j’ai rencontrés au primaire, ceux que j’ai connus au secondaire et ceux avec qui je suis allé au Cégep. Parmi les autres, il y a des blogueurs, des musiciens, des spécialistes de la bière et/ou du café, des collègues du milieu académique, quelques amis de mes amis, quelques anciens étudiants et quelques personnes qui ont manifesté un intérêt spécifique à mon égard. Pour le reste, ce sont des gens que j’ai rencontré en-ligne ou hors-ligne, généralement dans un contexte spécifique. Sur 471 contacts que j’ai sur Facebook à l’heure actuelle, moins d’une trentaine (27, pour être précis) que je n’étais pas en mesure d’identifier immédiatement. Parmi eux, peut-être trois ou quatre par rapport auxquels persiste une certaine ambiguïté. Et plusieurs personnes qui font partie de mon réseau direct mais que je n’ai pas rencontré très directement. En d’autres termes, des gens avec qui j’ai des liens moins étroits mais dont la présence dans mon réseau social est «pleine de sens», surtout si on pense aux fameux «liens faibles» (“weak ties”). D’ailleurs, ces liens faibles constituent une part importante de ce que j’ai tendance à appeler «l’effet du papillon social», par référence à l’effet papillon d’Edward Lorenz. Pour mémoire (selon TF1):

Prévisibilité : est-ce que le battement des ailes d’un papillon au Brésil peut déclencher une tornade au Texas?

Enfin… J’inclue surtout cette citation pour conserver quelques notes au sujet de cet effet. C’est une sorte de digression assez égoïste.

Toujours est-il que… Nous disions donc… Ah… Oui!

«Retrouver» mes amis, mes connaissances, mes liens, ça fait battre mes ailes de papillon social.

Flap flap!

Éloge de la courtoisie en-ligne

Nous y voilà!

Après avoir terminé mon billet sur le contact social, j’ai reçu quelques commentaires et eu d’autres occasions de réfléchir à la question. Ce billet faisait suite à une interaction spécifique que j’ai vécue hier mais aussi à divers autres événements. En écrivant ce billet sur le contact social, j’ai eu l’idée (peut-être saugrenue) d’écrire une liste de «conseils d’ami» pour les gens qui désirent me contacter. Contrairement à mon attitude habituelle, j’ai rédigé cette liste dans un mode assez impératif et télégraphique. C’est peut-être contraire à mon habitude, mais c’est un exercice intéressant à faire, dans mon cas.

Bien qu’énoncés sur un ton quasi-sentencieux, ces conseils se veulent être des idées de base avec lesquelles je travaille quand on me sollicite (ce qui arrive plusieurs fois par jour). C’est un peu ma façon de dire: je suis très facile à contacter mais voici ce que je considère comme étant des bonnes et mauvaises idées dans une procédure de contact. Ça vaut pour mes lecteurs ici, pour mes étudiants (avant que je aie rencontrés), pour des contacts indirects, etc.

Pour ce qui est du «contact social», je parlais d’un contexte plus spécifique que ce que j’ai laissé entendre. Un des problèmes, c’est que même si j’ai de la facilité à décrire ce contexte, j’ai de la difficulté à le nommer d’une façon qui soit sans équivoque. C’est un des mondes auxquels je participe et il est lié à l’«écosystème geek». En parlant de «célébrité» dans le billet sur le contact social, je faisais référence à une situation assez précise qui est celle de la vie publique de certaines des personnes qui passent le plus clair de leur temps en-ligne. Les limites sont pas très claires mais c’est un groupe de quelques millions de personnes, dont plusieurs Anglophones des États-Unis, qui entrent dans une des logiques spécifiques de la socialisation en-ligne. Des gens qui vivent et qui oeuvrent dans le média social, le marketing social, le réseau social, la vie sociale médiée par les communications en-ligne, etc.

Des «socialiseurs alpha», si on veut.

C’est pas un groupe homogène, loi de là. Mais c’est un groupe qui a ses codes, comme tout groupe social. Certains individus enfreignent les règles et ils sont ostracisés, parfois sans le savoir.

Ce qui me permet de parler de courtoisie.

Un des trucs dont on parle beaucoup dans nos cours d’introduction, en anthropologie culturelle, c’est la diversité des normes de politesse à l’échelle humaine. Pas parce que c’est une partie essentielle de nos recherches, mais c’est souvent une façon assez efficace de faire comprendre des concepts de base à des gens qui n’ont pas (encore) de formation ethnographique ou de regard anthropologique. C’est encore plus efficace dans le cas d’étudiants qui ont déjà été formés dans une autre discipline et qui ont parfois tendance à ramener les concepts à leur expérience personnelle (ce qui, soit dit en passant, est souvent une bonne stratégie d’apprentissage quand elle est bien appliquée). L’idée de base, c’est qu’il n’y a pas d’«universal», de la politesse (malgré ce que disent Brown et Levinson). Il n’y a pas de règle universelle de politesse qui vaut pour l’ensemble de la population humaine, peu importe la distance temporelle ou culturelle. Chaque contexte culturel est bourré de règles de politesse, très souvent tacites, mais elles ne sont pas identiques d’un contexte à l’autre. Qui plus est, la même règle, énoncée de la même façon, a souvent des applications et des implications très différentes d’un contexte à l’autre. Donc, en contexte, il faut savoir se plier.

En classe, il y en a toujours pour essayer de trouver des exceptions à cette idée de base. Mais ça devient un petit jeu semi-compétitif plutôt qu’un réel processus de compréhension. D’après moi, ç’a un lien avec ce que les pédagogues anglophones appellent “Ways of Knowing”. Ce sont des gens qui croient encore qu’il n’existe qu’une vérité que le prof est en charge de dévoiler. Avec eux, il y a plusieurs étapes à franchir mais ils finissent parfois par passer à une compréhension plus souple de la réalité.

Donc, une fois qu’on peut travailler avec cette idée de base sur la non-universalité de règles de politesse spécifiques, on peut travailler avec des contextes dans lesquelles la politesse fonctionne. Et elle l’est fonctionnelle!

Mes «conseils d’ami» et mon «petit guide sur le contact social en-ligne» étaient à inscrire dans une telle optique. Mon erreur est de n’avoir pas assez décrit le contexte en question.

Si on pense à la notion de «blogosphère», on a déjà une idée du contexte. Pas des blogueurs isolés. Une sphère sociale qui est concentrée autour du blogue. Ces jours-ci, à part le blogue, il y a d’autres plates-formes à travers lesquelles les gens dont je parle entretiennent des rapports sociaux plus ou moins approfondis. Le micro-blogue comme Identi.ca et Twitter, par exemple. Mais aussi des réseaux sociaux comme Facebook ou même un service de signets sociaux comme Digg. C’est un «petit monde», mais c’est un groupe assez influent, puisqu’il lie entre eux beaucoup d’acteurs importants d’Internet. C’est un réseau tentaculaire, qui a sa présence dans divers milieux. C’est aussi, et c’est là que mes propos peuvent sembler particulièrement étranges, le «noyau d’Internet», en ce sens que ce sont des membres de ce groupe qui ont un certain contrôle sur plusieurs des choses qui se passent en-ligne. Pour utiliser une analogie qui date de l’ère nationale-industrielle (le siècle dernier), c’est un peu comme la «capitale» d’Internet. Ou, pour une analogie encore plus vieillotte, c’est la «Métropole» de l’Internet conçu comme Empire.

Donc, pour revenir à la courtoisie…

La spécificité culturelle du groupe dont je parle a créé des tas de trucs au cours des années, y compris ce qu’ils ont appelé la «Netiquette» (de «-net» pour «Internet» et «étiquette»). Ce qui peut contribuer à rendre mes propos difficiles à saisir pour ceux qui suivent une autre logique que la mienne, c’est que tout en citant (et apportant du support à) certaines composantes de cette étiquette, je la remets en contexte. Personnellement, je considère cette étiquette très valable dans le contexte qui nous préoccupe et j’affirme mon appartenance à un groupe socio-culturel précis qui fait partie de l’ensemble plus vaste auquel je fais référence. Mais je conserve mon approche ethnographique.

La Netiquette est si bien «internalisée» par certains qu’elles semblent provenir du sens commun (le «gros bon sens» dont je parlais hier). C’est d’ailleurs, d’après moi, ce qui explique certaines réactions très vives au bris d’étiquette: «comment peux-tu contrevenir à une règle aussi simple que celle de donner un titre clair à ton message?» (avec variantes plus insultantes). Comme j’ai tenté de l’expliquer en contexte semi-académique, une des bases du conflit en-ligne (la “flame war”), c’est la difficulté de se ressaisir après un bris de communication. Le bris de communication, on le tient pour acquis, il se produit de toutes façons. Mais c’est la façon de réétablir la communication qui change tout.

De la même façon, c’est pas tant le bris d’étiquette qui pose problème. Du moins, pas l’occasion spécifique de manquement à une règle précise. C’est la dynamique qui s’installe suite à de nombreux manquements aux «règles de base» de la vie sociale d’un groupe précis. L’effet immédiat, c’est le découpage du ‘Net en plus petites factions.

Et, personnellement, je trouve dommage ce fractionnement, cette balkanisation.

Qui plus est, c’est dans ce contexte que, malgré mon relativisme bien relatif, j’assigne le terme «éthique» à mon hédonisme. Pas une éthique absolue et rigide. Mais une orientation vers la bonne entente sociale.

Qu’on me comprenne bien (ça serait génial!), je me plains pas du comportement des gens, je ne jugent pas ceux qui se «comportent mal» ou qui enfreignent les règles de ce monde dans lequel je vis. Mais je trouve utile de parler de cette dynamique. Thérapeutique, même.

La raison spécifique qui m’a poussé à écrire ce billet, c’est que deux des commentaires que j’ai reçu suite à mes billets d’hier ont fait appel (probablement sans le vouloir) au «je fais comme ça me plaît et ça dérange personne». Là où je me sens presqu’obligé de dire quelque-chose, c’est que le «ça dérange personne» me semblerait plutôt myope dans un contexte où les gens ont divers liens entre eux. Désolé si ça choque, mais je me fais le devoir d’être honnête.

D’ailleurs, je crois que c’est la logique du «troll», ce personnage du ‘Net qui prend un «malin plaisir» à bousculer les gens sur les forums et les blogues. C’est aussi la logique du type macho qui se plaît à dire: «Je pince les fesses des filles. Dix-neuf fois sur 20, je reçois une baffe. Mais la vingtième, c’est la bonne». Personnellement, outre le fait que je sois féministe, j’ai pas tant de problèmes que ça avec cette idée quand il s’agit d’un contexte qui le permet (comme la France des années 1990, où j’ai souvent entendu ce genre de truc). Mais là où ça joue pas, d’après moi, c’est quand cette attitude est celle d’un individu qui se meut dans un contexte où ce genre de chose est très mal considéré (par exemple, le milieu cosmopolite contemporain en Amérique du Nord). Au niveau individuel, c’est peut-être pas si bête. Mais au niveau social, ça fait pas preuve d’un sens éthique très approfondi.

Pour revenir au «troll». Ce personnage quasi-mythique génère une ambiance très tendue, en-ligne. Individuellement, il peut facilement considérer qu’il est «dans son droit» et que ses actions n’ont que peu de conséquences négatives. Mais, ce qui se remarque facilement, c’est que ce même individu tolère mal le comportement des autres. Il se débat «comme un diable dans le bénitier», mais c’est souvent lui qui «sème le vent» et «récolte la tempête». Un forum sans «troll», c’est un milieu très agréable, “nurturing”. Mais il n’est besoin que d’un «troll» pour démolir l’atmosphère de bonne entente. Surtout si les autres membres du groupes réagissent trop fortement.

D’ailleurs, ça me fait penser à ceux qui envoient du pourriel et autres Plaies d’Internet. Ils ont exactement la logique du pinceur de femmes, mais menée à l’extrême. Si aussi peu que 0.01% des gens acceptent le message indésirable, ils pourront en tirer un certain profit à peu d’effort, peu importe ce qui affecte 99.99% des récipiendaires. Tant qu’il y aura des gens pour croire à leurs balivernes ou pour ouvrir des fichiers attachés provenant d’inconnus, ils auront peut-être raison à un niveau assez primaire («j’ai obtenu ce que je voulais sans me forcer»). Mais c’est la société au complet qui en souffre. Surtout quand on parle d’une société aussi diversifiée et complexe que celle qui vit en-ligne.

C’est intéressant de penser au fait que la culture en-ligne anglophone accorde une certaine place à la notion de «karma». Depuis une expression désignant une forme particulière de causalité à composante spirituelle, cette notion a pris, dans la culture geek, un acception spécifique liée au mérite relatif des propos tenus en-ligne, surtout sur le vénérable site Slashdot. Malgré le glissement de sens de causalité «mystique» à évaluation par les pairs, on peut lier les deux concepts dans une idée du comportement optimal pour la communication en-ligne: la courtoisie.

Les Anglophones ont tendance à se fier, sans les nommer ou même les connaître, aux maximes de Grice. J’ai beau percevoir qu’elles ne sont pas universelles, j’y vois un intérêt particulier dans le contexte autour duquel je tourne. L’idée de base, comme le diraient Wilson et Sperber, est que «tout acte de communication ostensive communique la présomption de sa propre pertinence optimale». Cette pertinence optimale est liée à un processus à la fois cognitif et communicatif qui fait appel à plusieurs des notions élaborées par Grice et par d’autres philosophes du langage. Dans le contexte qui m’intéresse, il y a une espèce de jeu entre deux orientations qui font appel à la même notion de pertinence: l’orientation individuelle («je m’exprime») souvent légaliste-réductive («j’ai bien le droit de m’exprimer») et l’orientation sociale («nous dialoguons») souvent éthique-idéaliste («le fait de dialoguer va sauver le monde»).

Aucun mystère sur mon orientation préférée…

Par contre, faut pas se leurrer: le fait d’être courtois, en-ligne, a aussi des effets positifs au niveau purement individuel. En étant courtois, on se permet très souvent d’obtenir de réels bénéfices, qui sont parfois financiers (c’est comme ça qu’on m’a payé un iPod touch). Je parle pas d’une causalité «cosmique» mais bien d’un processus précis par lequel la bonne entente génère directement une bonne ambiance.

Bon, évidemment, je semble postuler ma propre capacité à être courtois. Il m’arrive en fait très souvent de me faire désigner comme étant très (voire trop) courtois. C’est peut-être réaliste, comme description, même si certains ne sont peut-être pas d’accord.

À vous de décider.

Le petit guide du contact social en-ligne (brouillon)

Je viens de publier un «avis à ceux qui cherchent à me contacter». Et je pense à mon expertise au sujet de la socialisation en-ligne. Ça m’a donné l’idée d’écrire une sorte de guide, pour aider des gens qui n’ont pas tellement d’expérience dans le domaine. J’ai de la difficulté à me vendre.

Oui, je suis un papillon social. Je me lie facilement d’amitié avec les gens et j’ai généralement d’excellents contacts. En fait, je suis très peu sélectif: à la base, j’aime tout le monde.

Ce qui ne veut absolument pas dire que mon degré d’intimité est constant, peu importe l’individu. En fait, ma façon de gérer le degré d’intimité est relativement complexe et dépend d’un grand nombre de facteurs. C’est bien conscient mais difficile à verbaliser, surtout en public.

Et ça m’amène à penser au fait que, comme plusieurs, je suis «très sollicité». Chaque jour, je reçois plusieurs requêtes de la part de gens qui veulent être en contact avec moi, d’une façon ou d’une autre. C’est tellement fréquent, que j’y pense peu. Mais ça fait partie de mon quotidien, comme c’est le cas pour beaucoup de gens qui passent du temps en-ligne (blogueurs, membres de réseaux sociaux, etc.).

Évidemment, un bon nombre de ces requêtes font partie de la catégorie «indésirable». On pourrait faire l’inventaire des Dix Grandes Plaies d’Internet, du pourriel jusqu’à la sollicitation  intempestive. Mais mon but ici est plus large. Discuter de certaines façons d’établir le contact social. Qu’il s’agisse de se lier d’amitié ou simplement d’entrer en relation sociale diffuse (de devenir la «connaissance» de quelqu’un d’autre).

La question de base: comment effectuer une requête appropriée pour se mettre en contact avec quelqu’un? Il y a des questions plus spécifiques. Par exemple, comment démontrer à quelqu’un que nos intentions sont légitimes? C’est pas très compliqué et c’est très rapide. Mais ça fait appel à une logique particulière que je crois bien connaître.

Une bonne partie de tout ça, c’est ce qu’on appelle ici «le gros bon sens». «Ce qui devrait être évident.» Mais, comme nous le disons souvent en ethnographie, ce qui semble évident pour certains peut paraître très bizarre pour d’autres. Dans le fond, le contact social en-ligne a ses propres contextes culturels et il faut apprendre à s’installer en-ligne comme on apprend à emménager dans une nouvelle région. Si la plupart des choses que je dis ici semblent très évidentes, ça n’implique pas qu’elles sont bien connues du «public en général».

Donc, quelle est la logique du contact social en-ligne?

Il faut d’abord bien comprendre que les gens qui passent beaucoup de temps en-ligne reçoivent des tonnes de requêtes à chaque jour. Même un papillon social comme moi finit par être sélectif. On veut bien être inclusifs mais on veut pas être inondés, alors on trie les requêtes qui nous parviennent. On veut bien faire confiance, mais on veut pas être dupes, alors on se tient sur nos gardes.

Donc, pour contacter quelqu’un comme moi, «y a la manière».

Une dimension très importante, c’est la transparence. Je pense même à la «transparence radicale». En se présentant aux autres, vaut mieux être transparent. Pas qu’il faut tout dévoiler, bien au contraire. Il faut «contrôler son masque». Il faut «manipuler le voile». Une excellente façon, c’est d’être transparent.

L’idée de base, derrière ce concept, c’est que l’anonymat absolu est illusoire. Tout ce qu’on fait en-ligne laisse une trace. Si les gens veulent nous retracer, ils ont souvent la possibilité de le faire. En donnant accès à un profil public, on évite certaines intrusions.

C’est un peu la même idée derrière la «géolocation». Dans «notre monde post-industriel», nous sommes souvent faciles à localiser dans l’espace (grâce, entre autres, à la radio-identification). D’un autre côté, les gens veulent parfois faire connaître aux autres leur situation géographique et ce pour de multiples raisons. En donnant aux gens quelques informations sur notre présence géographique, on tente de contrôler une partie de l’information à notre sujet. La «géolocation» peut aller de la très grande précision temporelle et géographique («je suis au bout du comptoir de Caffè in Gamba jusqu’à 13h30») jusqu’au plus vague («je serai de retour en Europe pour une période indéterminée, au cours des six prochains mois»). Il est par ailleurs possible de guider les gens sur une fausse piste, de leur faire croire qu’on est ailleurs que là où on est réellement. Il est également possible de donner juste assez de précisions pour que les gens n’aient pas d’intérêt particulier à nous «traquer». C’est un peu une contre-attaque face aux intrusions dans notre vie privée.

Puisque plusieurs «Internautes» ont adopté de telles stratégies contre les intrusions, il est important de respecter ces stratégies et il peut être utile d’adopter des stratégies similaires. Ce qui implique qu’il faudrait accepter l’image que veut projeter l’individu et donner à cet individu la possibilité de se faire une image de nous.

Dans la plupart des contextes sociaux, les gens se dévoilent beaucoup plus facilement à ceux qui se dévoilent eux-mêmes. Dans certains coins du monde (une bonne partie de la blogosphère mais aussi une grande partie de l’Afrique), les gens ont une façon très sophistiquée de se montrer très transparents tout en conservant une grande partie de leur vie très secrète. Se cacher en public. C’est une forme radicale de la «présentation de soi». Aucune hypocrisie dans tout ça. Rien de sournois. Mais une transparence bien contrôlée. Radicale par son utilité (et non par son manque de pudeur).

«En-ligne, tout le monde agit comme une célébrité.» En fait, tout le monde vit une vie assez publique, sur le ‘Net. Ce qui implique plusieurs choses. Tout d’abord qu’il est presqu’aussi difficile de protéger sa vie privée en-ligne que dans une ville africaine typique (où la gestion de la frontière entre vie publique et vie privée fait l’objet d’une très grande sophistication). Ça implique aussi que chaque personne est moins fragile aux assauts de la célébrité puisqu’il y a beaucoup plus d’information sur beaucoup plus de personnes. C’est un peu la théorie du bruit dans la lutte contre les paparazzi et autres prédateurs. C’est là où la transparence de plusieurs aide à conserver l’anonymat relatif de chacun.

D’après moi, la méthode la plus efficace de se montrer transparent, c’est de se construire un profil public sur un blogue et/ou sur un réseau social. Il y a des tas de façons de construire son profil selon nos propres besoins et intérêts, l’effet reste le même. C’est une façon de se «présenter», au sens fort du terme.

Le rôle du profil est beaucoup plus complexe que ne semblent le croire ces journalistes qui commentent la vie des «Internautes». Oui, ça peut être une «carte de visite», surtout utile dans le réseautage professionnel. Pour certains, c’est un peu comme une fiche d’agence de rencontre (avec poids et taille). Plusieurs personnes rendent publiques des choses qui semblent compromettantes. Mais c’est surtout une façon de contrôler l’image,

Dans une certaine mesure, «plus on dévoile, plus on cache». En offrant aux gens la possibilité d’en savoir plus sur nous, on se permet une marge de manœuvre. D’ailleurs, on peut se créer un personnage de toutes pièces, ce que beaucoup ont fait à une certaine époque. C’est une technique de dissimulation, d’assombrissement. Ou, en pensant à l’informatique, c’est une méthode de cryptage et d’«obfuscation».

Mais on peut aussi «être soi-même» et s’accepter tel quel. D’un point de vue «philosophie de vie», c’est pas mauvais, à mon sens.

En bâtissant son profil, on pense à ce qu’on veut dévoiler. Le degré de précision varie énormément en fonction de nos façons de procéder et en fonction des contextes. Rien de linéaire dans tout ça. Il y a des choses qu’on dévoilerait volontiers à une étrangère et qu’on n’avouerait pas à des proches. On peut maintenir une certaine personnalité publique qui est parfois plus réelle que notre comportement en privé. Et on utilise peut-être plus de tact avec des amis qu’avec des gens qui nous rencontrent par hasard.

Il y a toute la question de la vie privée, bien sûr. Mais c’est pas tout. D’ailleurs, faut la complexifier, cette idée de «vie privée». Beaucoup de ce qu’on peut dire sur soi-même peut avoir l’effet d’impliquer d’autres personnes. C’est parfois évident, parfois très subtil. La stratégie de «transparence radicale» dans le contact social en-ligne est parfois difficile à concilier avec notre vie sociale hors-ligne. Mais on ne peut pas se permettre de ne rien dire. Le tout est une question de dosage.

Il y a de multiples façons de se bâtir un profil public et elles sont généralement faciles à utiliser. La meilleure méthode dépend généralement du contexte et, outre le temps nécessaire pour les mettre à jour (individuellement ou de façon centralisée), il y a peu d’inconvénients d’avoir de nombreux profils publics sur différents services.

Personnellement, je trouve qu’un blogue est un excellent moyen de conserver un profil public. Ceux qui laissent des commentaires sur des blogues ont un intérêt tout particulier à se créer un profil de blogueur, même s’ils ne publient pas de billets eux-mêmes. Il y a un sens de la réciprocité, dans le monde du blogue. En fait, il y a toute une négociation au sujet des différences entre commentaire et billet. Il est parfois préférable d’écrire son propre billet en réponse à celui d’un autre (les liens entre billets sont répertoriés par les “pings” et “trackbacks”). Mais, en laissant un commentaire sur le blogue de quelqu’un d’autre, on fait une promotion indirecte: «modérée et tempérée» (dans tous les sens de ces termes).

Ma préférence va à WordPress.com et Disparate est mon blogue principal. Sans être un véritable réseau social, WordPress.com a quelques éléments qui facilitent les contacts entre blogueurs. Par exemple, tout commentaire publié sur un blogue WordPress.com par un utilisateur de WordPress.com sera automatiquement lié à ce compte, ce qui facilite l’écriture du commentaire (nul besoin de taper les informations) et lie le commentateur à son identité. Blogger (ou Blogspot.com) a aussi certains de ces avantages mais puisque plusieurs blogues sur Blogger acceptent les identifiants OpenID et que WordPress.com procure de tels identifiants, j’ai tendance à m’identifier à travers WordPress.com plutôt qu’à travers Google/Blogger.

Hors du monde des blogues, il y a celui des services de réseaux sociaux, depuis SixDegrees.com (à l’époque) à OpenSocial (à l’avenir). Tous ces services offrent à l’utilisateur la possibilité de créer un profil (général ou spécialisé) et de spécifier des liens que nous avons avec d’autres personnes.

Ces temps-ci, un peu tout ce qui est en-ligne a une dimension «sociale» en ce sens qu’il est généralement possible d’utiliser un peu n’importe quoi pour se lier à quelqu’un d’autre. Dans chaque cas, il y a un «travail de l’image» plus ou moins sophistiqué. Sans qu’on soit obligés d’entreprendre ce «travail de l’image» de façon très directe, ceux qui sont actifs en-ligne (y compris de nombreux adolescents) sont passés maîtres dans l’art de jouer avec leurs identités.

Il peut aussi être utile de créer un profil public sur des plates-formes de microblogue, comme Identi.ca et Twitter. Ces plates-formes ont un effet assez intéressant, au niveau du contact social. Le profil de chaque utilisateur est plutôt squelettique, mais les liens entre utilisateurs ont un certain degré de sophistication parce qu’il y a une distinction entre lien unidirectionnel et lien bidirectionnel. En fait, c’est relativement difficile à décrire hors-contexte alors je crois que je vais laisser tomber cette section pour l’instant. Un bon préalable pour comprendre la base du microbloguage, c’est ce court vidéo, aussi disponible avec sous-titres français.

Tout ça pour parler de profil public!

En commençant ce billet, je croyais élaborer plusieurs autres aspects. Mais je crois quand même que la base est là et je vais probablement écrire d’autres billets sur la même question, dans le futur.

Quand même quelques bribes, histoire de conserver ce billet «en chantier».

Un point important, d’après moi, c’est qu’il est généralement préférable de laisser aux autres le soin de se lier à nous, sauf quand il y a un lien qui peut être établi. C’est un peu l’idée derrière mon billet précédent. Oh, bien sûr, on peut aller au-devant des gens dans un contexte spécifique. Si nous sommes au même événement, on peut aller se présenter «sans autre». Dès qu’il y a communauté de pratique (ou communauté d’expérience), on peut en profiter pour faire connaissance. S’agit simplement de ne pas s’accaparer l’attention de qui que ce soit et d’accepter la façon qu’a l’autre de manifester ses opinions.

Donc, en contexte (même en-ligne), on peut aller au-devant des gens.

Mais, hors-contexte, c’est une idée assez saugrenue que d’aller se présenter chez les gens sans y avoir été conviés.

Pour moi, c’est un peu une question de courtoisie. Mais il y a aussi une question de la compréhension du contexte. Même si nous réagissons tous un peu de la même façon aux appels non-solicités, plusieurs ont de la difficulté à comprendre le protocole.

Et le protocole est pas si différent de la vie hors-ligne. D’ailleurs, une technique très utile dans les contextes hors-ligne et qui a son importance en-ligne, c’est l’utilisation d’intermédiaires. Peut-être parce que je pense au Mali, j’ai tendance à penser au rôle du griot et au jeu très complexe de l’indirection, dans le contact social. Le réseau professionnel LinkedIn fait appel à une version très fruste de ce principe d’indirection, sans étoffer le rôle de l’intermédiaire. Pourtant, c’est souvent en construisant la médiation sociale qu’on comprend vraiment comment fonctionnent les rapports sociaux.

Toujours est-il qu’il y a une marche à suivre, quand on veut contacter les gens en-ligne. Ce protocole est beaucoup plus fluide que ne peuvent l’être les codes sociaux les mieux connus dans les sociétés industriels. C’est peut-être ce qui trompe les gens peu expérimentés, qui croient que «sur Internet, on peut tout faire».

D’où l’idée d’aider les gens à comprendre le contact social en-ligne.

Ce billet a été en partie motivé par une requête qui m’a été envoyée par courriel. Cette personne tentait de se lier d’amitié avec moi mais sa requête était décontextualisée et très vague. Je lui ai donc écrit une réponse qui contenait certains éléments de ce que j’ai voulu écrire ici.

Voici un extrait de ma réponse:

Si t’as toi-même un blogue, c’est une excellente façon de se présenter. Ou un compte sur un des multiples réseaux sociaux. Après, tu peux laisser le lien sur ton profil quand tu contactes quelqu’un et laisser aux autres le soin de se lier à toi, si tu les intéresses. C’est très facile et très efficace. Les messages non-sollicités, directement à l’adresse courriel de quelqu’un, ça éveille des suspicions. Surtout quand le titre est très générique ou que le contenu du message est pas suffisamment spécifique. Pas de ta faute, mais c’est le contexte.

En fait, la meilleure méthode, c’est de passer par des contacts préétablis. Si on a des amis communs, le tour est joué. Sinon, la deuxième meilleure méthode, c’est de laisser un commentaire vraiment très pertinent sur le blogue de quelqu’un que tu veux connaître. C’est alors cette personne qui te contactera. Mais si le commentaire n’est pas assez pertinent, cette même personne peut croire que c’est un truc indésirable et effacer ton commentaire, voire t’inclure dans une liste noire.

J’utilise pas Yahoo! Messenger, non. Et je suis pas assez souvent sur d’autres plateformes de messagerie pour accepter de converser avec des gens, comme ça. Je sais que c’est une technique utilisée par certaines personnes sérieuses, mais c’est surtout un moyen utilisé par des gens malveillants.

Si vous avez besoin d’aide, vous savez comment me contacter! 😉