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Café à la québécoise

J’ai récemment publié un très long billet sur la scène du café à Montréal. Sans doûte à cause de sa longueur, ce billet ne semble pas avoir les effets escomptés. J’ai donc décidé de republier ce billet, section par section. Ce billet est la troisième section après l’introduction et une section sur les cafés italiens de Montréal. Cette section se concentre sur une certaine spécificité québécoise de la scène montréalaise du café.

La scène du café à Montréal comporte plusieurs autres institutions qui ne correspondent pas vraiment à l’image du café italien. Certains de ces endroits peuvent même servir de base à la «Renaissance du café à Montréal».

Dans l’ensemble, je dirais que ces cafés sont typiquement québécois. Pas que ces cafés soient vraiment exclusifs au Québec mais il y a quelque-chose de reconnaissable dans ces cafés qui me fait penser au goût québécois pour le café.

Comme les intellos de Montréal ont longtemps eu tendance à s’identifier à la France, certains de ces cafés ont une tendance française, voire parisienne. Pas qu’on y sert des larges bols de “café au lait” (à base de café filtre) accompagnés de pain sec. Mais le breuvage de base ressemble plus au café français qu’au café italien.

D’après moi, la référence à la France a eu beaucoup d’influence sur la perception des cafés montréalais par des gens de l’extérieur. Pour une large part, cette référence était plutôt une question d’ambiance qu’une question de caractéristiques gustatives et olfactives précises. Dans un café montréalais, des Nord-Américains ayant passé du temps en France pouvaient se «rappeler l’Europe». La Rive-Gauche à l’Ouest de l’Atlantique.

Pour revenir au mode «mémoires», je pense tout d’abord à la Brûlerie Saint-Denis comme institution montréalaise de ce type. Vers la fin de mon adolescence, c’est par l’entremise de la compagne de mon frère (qui y travaillait) que j’ai connu la Brûlerie. À l’époque, il s’agissait d’un café isolé (au cœur du Plateau, qui n’était pas encore si «chromé») et non d’une chaîne avec des succursales dispersées. Ce dont je me rappelle est assez représentatif d’une certaine spécificité québécoise: un «allongé» de qualité.

L’allongé (ou «espresso allongé») n’est pas exclusif au Québec mais c’est peut-être le breuvage le plus représentatif d’un goût québécois pour le café.

En Amérique du Nord, hors du Québec, l’allongé a généralement mauvaise réputation. Selon plusieurs, il s’agit d’une surextraction de l’espresso. Avec la même quantité de café moulu que pour un espresso à l’italienne d’une once, on produit un café de deux onces ou plus en laissant l’eau passer dans le café. «Toute chose étant égale par ailleurs», une telle surextraction amène dans la tasse des goûts considérés peu agréables, comme une trop grande amertume, voire de l’astringence. En même temps, la quantité de liquide dans la tasse implique une dillution extrême et on s’attend à un café «aqueux», peu goûteux.

Pourtant, je me rappelle de multiples allongés, presque tous dégustés au Québec, qui étaient savoureux sans être astringents. Selon toute logique, ce doit être parce que la mouture du café et le mélange de grains de café ont été adaptés à la réalisation d’un allongé de qualité. Ce qui implique certaines choses pour l’«espresso serré» (ou «espresso court», donc non-allongé) s’il est réalisé avec la même mouture et le même mélange. Même à Montréal, il est rare d’avoir dans le même café un excellent espresso court et un excellent allongé.

Mais parmi les Montréalais amateurs de café, l’allongé «a la cote» et les cafés montréalais typiques font généralement un bon allongé.

Selon mon souvenir, l’allongé de la Brûlerie Saint-Denis était de qualité. J’ai eu de moins bonnes expériences à la Brûlerie depuis que l’entreprise a ouvert d’autres succursales, mais c’est peut-être un hasard.

Une autre institution de la scène montréalaise du café, situé sur le Plateau comme la Brûlerie Saint-Denis à l’origine, c’est le café Aux Deux Marie. Le Deux Marie aujourd’hui ressemble beaucoup à mon souvenir de la Brûlerie Saint-Denis. Comme à la Brûlerie, j’y ai bu des allongés de qualité. C’est au Deux Marie que j’ai découvert certains «breuvages de spécialité» (“specialty drinks”, comme les appelle le World Barista Championship). Ces breuvages, à base d’espresso, contiennent des fruits, des épices, du chocolat et d’autres ingrédients. Si je me rappelle bien, la Brûlerie fait le même genre de breuvage mais je ne me rappelle pas en avoir remarqué, il y a une vingtaine d’années.

Il y a plusieurs autres «cafés à la québécoise». Dans les institutions connues, il y a La Petite Ardoise (tout près d’Outremont, sur Laurier). C’est d’ailleurs mon premier lieu de travail puisque j’y ai été plongeur, à la fin du secondaire (1988-9). C’est un «café bistro terrasse» assez typique de la scène culinaire montréalaise. Le cappuccino et l’allongé étaient très populaires (si je me rappelle bien, on les appelait «capp» et «all», respectivement). Et je me rappelle distinctement d’une cliente d’un autre café s’enquérir de la présence du «mélange de la Petite Ardoise». Honnêtement, je n’ai aucune idée sur ce que ce mélange comprenait ni sur la maison de torréfaction qui le produisait. Ma mémoire olfactive conserve la trace du «café de la Petite», surtout que le café était la seule chose que je pouvais consommer gratuitement quand j’y travaillais. La dernière fois que j’ai bu un café à La Petite Ardoise, il a titillé ma mémoire gustative mais je crois quand même qu’il a beaucoup changé, au cours des vingt dernières années.

Une autre institution typique, le Santropol (qui est aussi connu pour ses sandwiches et tisanes). Il y a quelques années, le Santropol a commencé à torréfier du café à large échelle et leurs cafés sont désormais disponibles dans les épiceries. Mon souvenir du café au Santropol se mêle à l’image du restaurant lui-même mais je crois me rappeler qu’il était assez représentatif du café à la québécoise.

Il y a plusieurs autres endroit que j’aurais tendance à mettre dans la catégorie «café à la québécoise», depuis La Petite Patrie jusqu’à Westmount, en passant par Villeray et Saint-Henri. Mais l’idée de base est surtout de décrire un type d’endroit. Il y a une question d’ambiance qui entre en ligne de compte mais, du côté du goût du café, la qualité de l’allongé est probablement le facteur le plus déterminant.

Ce qui surprend les plus les amateurs de café (surtout ceux qui ne sont pas nés à Montréal), c’est de savoir que j’ai dégusté des allongés de qualité dans un café de la chaîne Café Dépôt. Pour être honnête, j’étais moi-même surpris, la première fois. En général, les chaînes ont énormément de difficulté à faire du café de très haute qualité, surtout si on considère la nécessité de fournir toutes les succursales avec le même café. Mais je suis retourné à la même succursale de Café Dépôt et, à plusieurs reprises, j’ai pu boire un allongé qui correspond à mes goûts. D’ailleurs, j’aurais dit la même chose de certains cafés dégustés à une succursale de la chaîne Van Houtte. Mais c’était il y a plus de dix ans et Van Houtte semble avoir beaucoup changé depuis.

Café à la montréalaise

Montréal est en passe de (re)devenir une destination pour le café. Mieux encore, la «Renaissance du café à Montréal» risque d’avoir des conséquences bénéfiques pour l’ensemble du milieu culinaire de la métropole québécoise.

Cette thèse peut sembler personnelle et je n’entends pas la proposer de façon dogmatique. Mais en me mêlant au milieu du café à Montréal, j’ai accumulé un certain nombre d’impressions qu’il me ferait plaisir de partager. Il y a même de la «pensée magique» dans tout ça en ce sens qu’il me semble plus facile de rebâtir la scène montréalaise du café si nous avons une idée assez juste de ce qui constitue la spécificité montréalaise.

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Éloge de la courtoisie en-ligne

Nous y voilà!

Après avoir terminé mon billet sur le contact social, j’ai reçu quelques commentaires et eu d’autres occasions de réfléchir à la question. Ce billet faisait suite à une interaction spécifique que j’ai vécue hier mais aussi à divers autres événements. En écrivant ce billet sur le contact social, j’ai eu l’idée (peut-être saugrenue) d’écrire une liste de «conseils d’ami» pour les gens qui désirent me contacter. Contrairement à mon attitude habituelle, j’ai rédigé cette liste dans un mode assez impératif et télégraphique. C’est peut-être contraire à mon habitude, mais c’est un exercice intéressant à faire, dans mon cas.

Bien qu’énoncés sur un ton quasi-sentencieux, ces conseils se veulent être des idées de base avec lesquelles je travaille quand on me sollicite (ce qui arrive plusieurs fois par jour). C’est un peu ma façon de dire: je suis très facile à contacter mais voici ce que je considère comme étant des bonnes et mauvaises idées dans une procédure de contact. Ça vaut pour mes lecteurs ici, pour mes étudiants (avant que je aie rencontrés), pour des contacts indirects, etc.

Pour ce qui est du «contact social», je parlais d’un contexte plus spécifique que ce que j’ai laissé entendre. Un des problèmes, c’est que même si j’ai de la facilité à décrire ce contexte, j’ai de la difficulté à le nommer d’une façon qui soit sans équivoque. C’est un des mondes auxquels je participe et il est lié à l’«écosystème geek». En parlant de «célébrité» dans le billet sur le contact social, je faisais référence à une situation assez précise qui est celle de la vie publique de certaines des personnes qui passent le plus clair de leur temps en-ligne. Les limites sont pas très claires mais c’est un groupe de quelques millions de personnes, dont plusieurs Anglophones des États-Unis, qui entrent dans une des logiques spécifiques de la socialisation en-ligne. Des gens qui vivent et qui oeuvrent dans le média social, le marketing social, le réseau social, la vie sociale médiée par les communications en-ligne, etc.

Des «socialiseurs alpha», si on veut.

C’est pas un groupe homogène, loi de là. Mais c’est un groupe qui a ses codes, comme tout groupe social. Certains individus enfreignent les règles et ils sont ostracisés, parfois sans le savoir.

Ce qui me permet de parler de courtoisie.

Un des trucs dont on parle beaucoup dans nos cours d’introduction, en anthropologie culturelle, c’est la diversité des normes de politesse à l’échelle humaine. Pas parce que c’est une partie essentielle de nos recherches, mais c’est souvent une façon assez efficace de faire comprendre des concepts de base à des gens qui n’ont pas (encore) de formation ethnographique ou de regard anthropologique. C’est encore plus efficace dans le cas d’étudiants qui ont déjà été formés dans une autre discipline et qui ont parfois tendance à ramener les concepts à leur expérience personnelle (ce qui, soit dit en passant, est souvent une bonne stratégie d’apprentissage quand elle est bien appliquée). L’idée de base, c’est qu’il n’y a pas d’«universal», de la politesse (malgré ce que disent Brown et Levinson). Il n’y a pas de règle universelle de politesse qui vaut pour l’ensemble de la population humaine, peu importe la distance temporelle ou culturelle. Chaque contexte culturel est bourré de règles de politesse, très souvent tacites, mais elles ne sont pas identiques d’un contexte à l’autre. Qui plus est, la même règle, énoncée de la même façon, a souvent des applications et des implications très différentes d’un contexte à l’autre. Donc, en contexte, il faut savoir se plier.

En classe, il y en a toujours pour essayer de trouver des exceptions à cette idée de base. Mais ça devient un petit jeu semi-compétitif plutôt qu’un réel processus de compréhension. D’après moi, ç’a un lien avec ce que les pédagogues anglophones appellent “Ways of Knowing”. Ce sont des gens qui croient encore qu’il n’existe qu’une vérité que le prof est en charge de dévoiler. Avec eux, il y a plusieurs étapes à franchir mais ils finissent parfois par passer à une compréhension plus souple de la réalité.

Donc, une fois qu’on peut travailler avec cette idée de base sur la non-universalité de règles de politesse spécifiques, on peut travailler avec des contextes dans lesquelles la politesse fonctionne. Et elle l’est fonctionnelle!

Mes «conseils d’ami» et mon «petit guide sur le contact social en-ligne» étaient à inscrire dans une telle optique. Mon erreur est de n’avoir pas assez décrit le contexte en question.

Si on pense à la notion de «blogosphère», on a déjà une idée du contexte. Pas des blogueurs isolés. Une sphère sociale qui est concentrée autour du blogue. Ces jours-ci, à part le blogue, il y a d’autres plates-formes à travers lesquelles les gens dont je parle entretiennent des rapports sociaux plus ou moins approfondis. Le micro-blogue comme Identi.ca et Twitter, par exemple. Mais aussi des réseaux sociaux comme Facebook ou même un service de signets sociaux comme Digg. C’est un «petit monde», mais c’est un groupe assez influent, puisqu’il lie entre eux beaucoup d’acteurs importants d’Internet. C’est un réseau tentaculaire, qui a sa présence dans divers milieux. C’est aussi, et c’est là que mes propos peuvent sembler particulièrement étranges, le «noyau d’Internet», en ce sens que ce sont des membres de ce groupe qui ont un certain contrôle sur plusieurs des choses qui se passent en-ligne. Pour utiliser une analogie qui date de l’ère nationale-industrielle (le siècle dernier), c’est un peu comme la «capitale» d’Internet. Ou, pour une analogie encore plus vieillotte, c’est la «Métropole» de l’Internet conçu comme Empire.

Donc, pour revenir à la courtoisie…

La spécificité culturelle du groupe dont je parle a créé des tas de trucs au cours des années, y compris ce qu’ils ont appelé la «Netiquette» (de «-net» pour «Internet» et «étiquette»). Ce qui peut contribuer à rendre mes propos difficiles à saisir pour ceux qui suivent une autre logique que la mienne, c’est que tout en citant (et apportant du support à) certaines composantes de cette étiquette, je la remets en contexte. Personnellement, je considère cette étiquette très valable dans le contexte qui nous préoccupe et j’affirme mon appartenance à un groupe socio-culturel précis qui fait partie de l’ensemble plus vaste auquel je fais référence. Mais je conserve mon approche ethnographique.

La Netiquette est si bien «internalisée» par certains qu’elles semblent provenir du sens commun (le «gros bon sens» dont je parlais hier). C’est d’ailleurs, d’après moi, ce qui explique certaines réactions très vives au bris d’étiquette: «comment peux-tu contrevenir à une règle aussi simple que celle de donner un titre clair à ton message?» (avec variantes plus insultantes). Comme j’ai tenté de l’expliquer en contexte semi-académique, une des bases du conflit en-ligne (la “flame war”), c’est la difficulté de se ressaisir après un bris de communication. Le bris de communication, on le tient pour acquis, il se produit de toutes façons. Mais c’est la façon de réétablir la communication qui change tout.

De la même façon, c’est pas tant le bris d’étiquette qui pose problème. Du moins, pas l’occasion spécifique de manquement à une règle précise. C’est la dynamique qui s’installe suite à de nombreux manquements aux «règles de base» de la vie sociale d’un groupe précis. L’effet immédiat, c’est le découpage du ‘Net en plus petites factions.

Et, personnellement, je trouve dommage ce fractionnement, cette balkanisation.

Qui plus est, c’est dans ce contexte que, malgré mon relativisme bien relatif, j’assigne le terme «éthique» à mon hédonisme. Pas une éthique absolue et rigide. Mais une orientation vers la bonne entente sociale.

Qu’on me comprenne bien (ça serait génial!), je me plains pas du comportement des gens, je ne jugent pas ceux qui se «comportent mal» ou qui enfreignent les règles de ce monde dans lequel je vis. Mais je trouve utile de parler de cette dynamique. Thérapeutique, même.

La raison spécifique qui m’a poussé à écrire ce billet, c’est que deux des commentaires que j’ai reçu suite à mes billets d’hier ont fait appel (probablement sans le vouloir) au «je fais comme ça me plaît et ça dérange personne». Là où je me sens presqu’obligé de dire quelque-chose, c’est que le «ça dérange personne» me semblerait plutôt myope dans un contexte où les gens ont divers liens entre eux. Désolé si ça choque, mais je me fais le devoir d’être honnête.

D’ailleurs, je crois que c’est la logique du «troll», ce personnage du ‘Net qui prend un «malin plaisir» à bousculer les gens sur les forums et les blogues. C’est aussi la logique du type macho qui se plaît à dire: «Je pince les fesses des filles. Dix-neuf fois sur 20, je reçois une baffe. Mais la vingtième, c’est la bonne». Personnellement, outre le fait que je sois féministe, j’ai pas tant de problèmes que ça avec cette idée quand il s’agit d’un contexte qui le permet (comme la France des années 1990, où j’ai souvent entendu ce genre de truc). Mais là où ça joue pas, d’après moi, c’est quand cette attitude est celle d’un individu qui se meut dans un contexte où ce genre de chose est très mal considéré (par exemple, le milieu cosmopolite contemporain en Amérique du Nord). Au niveau individuel, c’est peut-être pas si bête. Mais au niveau social, ça fait pas preuve d’un sens éthique très approfondi.

Pour revenir au «troll». Ce personnage quasi-mythique génère une ambiance très tendue, en-ligne. Individuellement, il peut facilement considérer qu’il est «dans son droit» et que ses actions n’ont que peu de conséquences négatives. Mais, ce qui se remarque facilement, c’est que ce même individu tolère mal le comportement des autres. Il se débat «comme un diable dans le bénitier», mais c’est souvent lui qui «sème le vent» et «récolte la tempête». Un forum sans «troll», c’est un milieu très agréable, “nurturing”. Mais il n’est besoin que d’un «troll» pour démolir l’atmosphère de bonne entente. Surtout si les autres membres du groupes réagissent trop fortement.

D’ailleurs, ça me fait penser à ceux qui envoient du pourriel et autres Plaies d’Internet. Ils ont exactement la logique du pinceur de femmes, mais menée à l’extrême. Si aussi peu que 0.01% des gens acceptent le message indésirable, ils pourront en tirer un certain profit à peu d’effort, peu importe ce qui affecte 99.99% des récipiendaires. Tant qu’il y aura des gens pour croire à leurs balivernes ou pour ouvrir des fichiers attachés provenant d’inconnus, ils auront peut-être raison à un niveau assez primaire («j’ai obtenu ce que je voulais sans me forcer»). Mais c’est la société au complet qui en souffre. Surtout quand on parle d’une société aussi diversifiée et complexe que celle qui vit en-ligne.

C’est intéressant de penser au fait que la culture en-ligne anglophone accorde une certaine place à la notion de «karma». Depuis une expression désignant une forme particulière de causalité à composante spirituelle, cette notion a pris, dans la culture geek, un acception spécifique liée au mérite relatif des propos tenus en-ligne, surtout sur le vénérable site Slashdot. Malgré le glissement de sens de causalité «mystique» à évaluation par les pairs, on peut lier les deux concepts dans une idée du comportement optimal pour la communication en-ligne: la courtoisie.

Les Anglophones ont tendance à se fier, sans les nommer ou même les connaître, aux maximes de Grice. J’ai beau percevoir qu’elles ne sont pas universelles, j’y vois un intérêt particulier dans le contexte autour duquel je tourne. L’idée de base, comme le diraient Wilson et Sperber, est que «tout acte de communication ostensive communique la présomption de sa propre pertinence optimale». Cette pertinence optimale est liée à un processus à la fois cognitif et communicatif qui fait appel à plusieurs des notions élaborées par Grice et par d’autres philosophes du langage. Dans le contexte qui m’intéresse, il y a une espèce de jeu entre deux orientations qui font appel à la même notion de pertinence: l’orientation individuelle («je m’exprime») souvent légaliste-réductive («j’ai bien le droit de m’exprimer») et l’orientation sociale («nous dialoguons») souvent éthique-idéaliste («le fait de dialoguer va sauver le monde»).

Aucun mystère sur mon orientation préférée…

Par contre, faut pas se leurrer: le fait d’être courtois, en-ligne, a aussi des effets positifs au niveau purement individuel. En étant courtois, on se permet très souvent d’obtenir de réels bénéfices, qui sont parfois financiers (c’est comme ça qu’on m’a payé un iPod touch). Je parle pas d’une causalité «cosmique» mais bien d’un processus précis par lequel la bonne entente génère directement une bonne ambiance.

Bon, évidemment, je semble postuler ma propre capacité à être courtois. Il m’arrive en fait très souvent de me faire désigner comme étant très (voire trop) courtois. C’est peut-être réaliste, comme description, même si certains ne sont peut-être pas d’accord.

À vous de décider.

One Hundred and Twenty-Four Years Ago

On this day, 124 years ago, France presented a colossal statue to the United States, commemorating the friendship between the two countries.

Statue of Liberty — Britannica Online Encyclopedia

Actually, July 4 has been a busy day. It’s the day Thoreau moved to Walden Point. The day Hawthorne was born. The day Vivekananda, John Adams, and Thomas Jefferson died. The day Alice in Wonderland was first published. The day the Crab Nebula was noticed by the Chinese.

And the day the Republic of the Philippines was proclaimed and independent country.

Really. A busy day.

Bookish Reference

Thinking about reference books, these days.

Are models inspired by reference books (encyclopedias, dictionaries, phonebooks, atlases…) still relevant in the context of almost-ubiquitous Internet access?

I don’t have an answer but questions such as these send me on streams of thought. I like thought streaming.

One stream of thought relates to a discussion I’ve had with fellow Yulblogger Martin Lessard about “trust in sources.” IIRC, Lessard was talking more specifically about individuals but I tend to react the same way about “source credibility” whether the source is a single human being, an institution, or a piece of writing. Typically, my reaction is a knee-jerk one: “No information is to be trusted, regardless of the source. Critical thinking and the scientific method both imply that we should apply the same rigorous analysis to any piece of information, regardless of the alleged source.” But this reasoned stance of mine is confronted with the reality of people (including myself and other vocal proponents of critical thinking) acting, at least occasionally, as if we did “trust” sources differentially.

I still think that this trusty attitude toward some sources needs to be challenged in contexts which give a lot of significance to information validity. Conversely, maybe there’s value in trust because information doesn’t always have to be that valid and because it’s often more expedient to trust some sources than to “apply the same rigorous analysis to information coming from any source.”

I also think that there are different forms of trust. From a strong version which relates to faith, all the way to a weak version, tantamount to suspension of disbelief. It’s not just a question of degree as there are different origins for source-trust, from positive prior experiences with a given source to the hierarchical dimensions of social status.

A basic point, here, might be that “trust in source” is contextual, nuanced, changing, constructed… relative.

Second stream of thought: popular reference books. I’m still afraid of groupthink, but there’s something deep about some well-known references.

Just learnt, through the most recent issue of Peter Suber’s SPARC Open Access newsletter, some news about French reference book editor Larousse (now part of Hachette, which is owned by Lagardère) making a move toward Open Access. Through their Larousse.fr site, Larousse is not only making some of its content available for open access but it’s adding some user-contributed content to its site. As an Open Access enthusiast, I do find the OA angle interesting. But the user-content angle leads me in another direction having to do with reference books.

What may not be well-known outside of Francophone contexts is that Larousse is pretty much a “household name” in many French-speaking homes. Larousse dictionaries have been commonly used in schools and they have been selling quite well through much of the editor’s history. Not to mention that some specialized reference books published by Larousse, are quite unique.

To make this more personal: I pretty much grew up on Larousse dictionaries. In my mind, Larousse dictionaries were typically less “stuffy” and more encyclopedic in approach than other well-known French dictionaries. Not only did Larousse’s flagship Petit Larousse illustré contain numerous images, but some aspect of its supplementary content, including Latin expressions and proverbs, were very useful and convenient. At the same time, Larousse’s fairly extensive line of reference books could retain some of the prestige afforded its stuffier and less encyclopedic counterparts in the French reference book market. Perhaps because I never enjoyed stuffiness, I pretty much associated my view of erudition with Larousse dictionaries. Through a significant portion of my childhood, I spent countless hours reading disparate pieces of Larousse dictionaries. Just for fun.

So, for me, freely accessing and potentially contributing to Larousse feels strange. Can’t help but think of our battered household copies of Petit Larousse illustré. It’s a bit as if a comics enthusiast were not only given access to a set of Marvel or DC comics but could also go on the drawing board. I’ve never been “into” comics but I could recognize my childhood self as a dictionary nerd.

There’s a clear connection in my mind between my Larousse-enhanced childhood memories and my attitude toward using Wikipedia. Sure, Petit Larousse was edited in a “closed” environment, by a committee. But there was a sense of discovery with Petit Larousse that I later found with CD-ROM and online encyclopedias. I used a few of these, over the years, and I eventually stuck with Wikipedia for much of this encyclopedic fun. Like probably many others, I’ve spent some pleasant hours browsing through Wikipedia, creating in my head a more complex picture of the world.

Which is not to say that I perceive Larousse as creating a new Wikipedia. Describing the Larousse.fr move toward open access and user-contributed content, the Independent mostly compares Larousse with Wikipedia. In fact, a Larousse representative seems to have made some specific statements about trying to compete with Wikipedia. Yet, the new Larousse.fr site is significantly different from Wikipedia.

As Suber says, Larousse’s attempt is closer to Google’s knols than to Wikipedia. In contrast with the Wikipedia model but as in Google’s knol model, content contributed by users on the Larousse site preserves an explicit sense of authorship. According to the demo video for Larousse.fr, some specific features have been implemented on the site to help users gather around specific topics. Something similar has happened informally with some Wikipedians, but the Larousse site makes these features rather obvious and, as some would say, “user-friendly.” After all, while many people do contribute to Wikipedia, some groups of editors function more like tight-knit communities or aficionados than like amorphous groups of casual users. One interesting detail about the Larousse model is that user-contributed and Larousse contents run in parallel to one another. There are bridges in terms of related articles, but the distinction seems clear. Despite my tendency to wait for prestige structures to “just collapse, already,” I happen to think this model is sensible in the context of well-known reference books. Larousse is “reliable, dependable, trusty.” Like comfort food. Or like any number of items sold in commercials with an old-time feel.

So, “Wikipedia the model” is quite different from the Larousse model but both Wikipedia and Petit Larousse can be used in similar ways.

Another stream of thought, here, revolves around the venerable institution known as Encyclopædia Britannica. Britannica recently made it possible for bloggers (and other people publishing textual content online) to apply for an account giving them access to the complete online content of the encyclopedia. With this access comes the possibility to make specific articles available to our readers via simple linking, in a move reminiscent of the Financial Times model.

Since I received my “blogger accreditation to Britannica content,” I did browse some article on Britannica.com. I receive Britannica’s “On This Day” newsletter of historical events in my inbox daily and it did lead me to some intriguing entries. I did “happen” on some interesting content and I even used Britannica links on my main blog as well as in some forum posts for a course I teach online.

But, I must say, Britannica.com is just “not doing it for me.”

For one thing, the site is cluttered and cumbersome. Content is displayed in small chunks, extra content is almost dominant, links to related items are often confusing and, more sadly, many articles just don’t have enough content to make visits satisfying or worthwhile. Not to mention that it is quite difficult to link to a specific part of the content as the site doesn’t use page anchors in a standard way.

To be honest, I was enthusiastic when I first read about Britannica.com’s blogger access. Perhaps because of the (small) thrill of getting “privileged” access to protected content, I thought I might find the site useful. But time and again, I had to resort to Wikipedia. Wikipedia, like an old Larousse dictionary, is dependable. Besides, I trust my sense of judgement to not be too affect by inaccurate or invalid information.

One aspect of my deception with Britannica relates to the fact that, when I write things online, I use links as a way to give readers more information, to help them exercise critical thinking, to get them thinking about some concepts and issues, and/or to play with some potential ambiguity. In all of those cases, I want to link to a resource which is straightforward, easy to access, easy to share, clear, and “open toward the rest of the world.”

Britannica is not it. Despite all its “credibility” and perceived prestige, Britannica.com isn’t providing me with the kind of service I’m looking for. I don’t need a reference book in the traditional sense. I need something to give to other people.

After waxing nostalgic about Larousse and ranting about Britannica, I realize how funny some of this may seem, from the outside. In fact, given the structure of the Larousse.fr site, I already think that I won’t find it much more useful than Britannica for my needs and I’ll surely resort to Wikipedia, yet again.

But, at least, it’s all given me the opportunity to stream some thoughts about reference books. Yes, I’m enough of a knowledge geek to enjoy it.

TàC en France

L’article de Zilbertin me semble un peu étrange, côté écriture (problème de rédac‘?). Tout de même intéressant de voir que Le Monde peut s’intéresser au phénomène Têtes à claques. La capsule elle-même joue sur plusieurs stéréotypes mais, bon, c’est permis, après tout…

Les “Têtes à claques” du Québec débarquent en France
LE MONDE | 20.06.07

© Le Monde.fr

Food and Social Life

Short blog entry by Jacques Attali on statistics about shared meals in “Western Civilizations.”

Conversation avec Jacques Attali: Dînons ensemble

The main claim is that France is still at the top of the list of places where people do enjoy shared meals. Still, Attali does mention some of the realities hidden by those statistics.

Interestingly enough, several of the comments on this entry are about other parts of the world where food consumption is an important social activity, including parts of Asia and Africa.

To me, a basic part of ethnography has to do with groups formed at meals. In some cases, it might be a group of relatives considered as a “household” or “family unit.” In other contexts, meal sharers might consider themselves to be part of the same social group, as when all members of the same age-set eat together.

There’s also the shared consumption of non-nutritional items like tea and alcohol. Perhaps because of my passion for both coffee and beer, I find the process of having coffee or beer with someone else one of the most pleasurable experiences one can have. The complex aromas of those drinks do enhance the experience and the fact that their nutritional value isn’t the main point of their consumption makes the event less utilitarian than socially consequent.

No idea if there are statistics on shared consumption of drinks but they clearly represent an important domain for the study of social life.

Balado et radio, version Sarko

L’effet est saisissant. Arte Radio, la balado-diffusion de la chaîne Arte, s’amuse à faire une parodie de DJ radio, version Sarko. Outre le thème politique, j’apprécie le contraste entre cet extrait et le son habituel d’Arte Radio. C’est en entendant cet extrait que je m’aperçois à quel point la radio me rase et que la balado est plus près de mes habitudes d’écoute.