Une réflexion qui date d’un certain temps mais cette liste (humouristique) de mensonges de blogueur (découverte grâce au podcast de Pointblog.com) me pousse à en faire un billet. Accorde-t-on de l’importance au lectorat de nos blogues?
La liste est assez amusante, c’est un modèle de blague assez courant, surtout en anglais. Il y en a une assez connue sur les étudiants aux études supérieures qui est en fait très similaire. Pour ceux d’entre nous qui sont dans le milieu des études supérieures et du blogue, c’est peut-être encore plus drôle.
C’est un genre de blague qui peut prêter à une réponse. Pas pour diminuer l’aspect humoristique de la blague, mais pour se situer personnellement. Désolé si c’est sérieux.
Plus spécifiquement, le fait que les blogueurs disent n’accorder aucune d’importance au lectorat mais que c’est un mensonge. En fait, dans le cas de cette blague, c’est la l’importance qu’on donne au “traffic” (on dit «trafic», «circulation» ou autre chose, pour le nombre de personnes qui lisent nos blogues?).
Voici l’élément en question dans la liste des principaux mensonges des blogueurs:
2. I don’t care about traffic.
Of course I don’t. Even though I’m a freelance consultant, and my blog is my primary way of marketing myself. Rock on.
Donc, d’après cette blague, les blogueurs mentent quand ils disent ne pas accorder d’importance au nombre de visiteurs sur leurs blogues. La preuve que c’est un mensonge, leurs blogues sont une façon pour eux de se vendre dans le marché du travail. Au moins, ç’a le mérite d’être clair. Et c’est amusant.
Il y a même une autre liste humoristique sur le même site qui énumère des raisons expliquant le manque de visiteurs sur les blogues. Avec cette phrase:
Somehow your eighth-grade English teacher managed to convince you that truth & beauty were more important to people than money & power. And you’ve been paying dearly for it ever since.
Encore là, c’est clair et amusant. Mais est-ce que c’est vraiment mon prof d’anglais de Secondaire II qui m’a convaincu qu’il y avait des choses plus importantes au monde que l’argent et la puissance? En fait, ceux qui essaient de convaincre les autres qu’il y a autre chose dans la vie que de faire du fric ou le pouvoir, ils sont tous profs d’anglais au secondaire? Dans le fond, c’est pas plus mal puisqu’il y a beaucoup de profs d’anglais dans les écoles secondaires de la planète et que ça donne probablement une vision plus large du monde que le blogue typique qui, d’après ces blagues, est écrit par un “unemployed tech consultant”. On se rapproche de quelque-chose. Le rapport du blogue au lectorat est lié à la situation de celle ou celui qui écrit ce blogue.
Donc, bas les masques. Je ne suis ni un conseiller informatique au chômage, ni un prof d’anglais au secondaire. Mais je suis plus proche du second que du premier puisque j’enseigne (en anglais) au niveau universitaire. Voilà qui est établi. Mon but en bloguant? Plusieurs choses, évidemment.
Un petit historique.
- À la fin du mois de mars 2005, je suis allé à un atelier sur les blogues donné par un centre universitaire qui met l’accent sur l’excellence en enseignement. L’atelier était intéressant en soit et j’avais mon iBook avec moi. J’ai pas vraiment blogué l’atelier, mais j’ai créé mon premier blogue pendant l’atelier.
- Jusqu’à cet atelier, j’avais éviter de commencer à bloguer de peur que ça me prenne trop de temps. Après près d’un an, je peux dire que ça ne prend que le temps que je décide à y consacrer même si j’ai des périodes (courtes) pendant lesquelles je blogue «frénétiquement».
- Cet atelier était donné, entre autres, par un prof d’anglais. (Oui, oui, «justement»… 😉 ) Ken Smith, ce prof d’anglais, maintient un blogue sur les blogues et l’enseignement. On peut le voir comme un défenseur de la cause blogueuse dans le milieu académique et, au moins à Indiana University South Bend où il enseigne (et où j’enseignais l’année dernière), il a rendu les blogues académiques assez visibles.
- Dans cette situation, c’était assez facile d’être convaincu qu’un blogue peut être utile.
Mes raisons de bloguer, dans le désordre:
- C’est une façon intéressante de prendre des notes sur des choses auxquelles je pense.
- Comme les blogues commencent à prendre de l’importance, y compris dans le milieu académique, c’est une bonne chose d’essayer. En fait, je suis le type d’utilisateur informatique qui va essayer tout et n’importe quoi, pour le plaisir de la chose.
- Bloguer, c’est un peu pratiquer l’écriture. Dans le milieu académique, on écrit très énormément beaucoup. Voire plus. Beaucoup de ce qu’on écrit n’est jamais publié. Mais on doit développer des techniques d’écriture. Le blogue est un bon moyen pour ça.
- Je vois le blogue comme un «bac à sable», une aire de jeu libre. C’est en grande partie le sens que le terme “sandbox” prend en anglais, notamment sur les Wiki où ils servent d’aires d’expérimentation. Un banc d’essai où tout est permis. Et c’est un concept qui m’intéresse.
- Je vois aussi le blogue comme une «boîte à souliers», c.-à-d. un fourre-tout où placer des choses que je veux revoir plus tard. C’est en grande partie que le terme “shoebox” en anglais, notamment dans une chanson connue du groupe canadien Barenaked Ladies.
- Il m’arrive même de voir le blogue comme une «boîte à savon» dans le sens anglais de “soapbox“, une petite estrade improvisée qui sert à un individu à dire ce qu’il a à dire. Cette idée d’une agora ouverte et libre, sans structure, est très séduisante. Dans ce cas-ci, même si personne m’écoute, je l’ai au moins dit.
- Donc je vois le blogue comme toutes sortes de «boîtes» personnelles. Les trois termes (sandbox, shoebox, sandbox) ont l’avantage de se ressembler, donc ça devient mnémotechnique. Ridicule? Bien sûr.
- J’aime bloguer parce que ça permet de regrouper des tas de choses. Par exemple, des réactions à des choses que je lis en-ligne. À une certaine époque, je me mettais à envoyer des messages aux auteurs de certains textes. Assez régulièrement. Ça encourageait le dialogue et j’avais ces conversations en tant que messages électroniques et je pouvais y revenir. Mais ç’avait l’inconvénient d’être complétement privé, ça pouvait prendre pas mal de temps (plus que de répondre en bloc), c’était pas centralisé sur mon compte de courrier électronique (avant Gmail) et c’était encore moins structuré qu’un billet de blogue.
- Le blogue est, évidemment, une façon de «publier», au sens fort du terme. Rendre public. Mettre à la disposition du plus grand nombre. Pas pour attirer ce «plus grand nombre» dans le but de leur soutirer de l’argent d’une façon ou d’une autre, mais pour donner la possibilité à des inconnus l’occasion de lire quelque-chose que j’avais à dire, à un moment ou à un autre. Éventuellement, j’aimerais publier certains écrits académiques sous forme de blogue. Et j’ai tendance à surtout parler de notions académiques, de toutes façons.
- Un blogue peut facilement jouer le rôle d’une page personnelle. Et on a rapidement besoin d’une page personnelle quand on passe pas mal de temps sur le ‘Net.
- À une certaine époque (en 1994 ou 1995), je me suis créé une page personnelle sur le serveur du laboratoire où je travaillais à l’époque.
- J’avais simplement utilisé le modèle de la page personnelle de mon ami Alexandre Burton, puis j’y avais mis quelques liens. Ça m’avait pris quelques minutes et ç’avait été relativement utile comme expérience.
- Après avoir envoyé le lien sur cette page personnelle à quelques personnes que je connaissais, j’avais eu quelques conversations avec des gens qui l’utilisaient comme une liste de signets.
- Entre autres, le blogue est un peu comme une carte de visite. Pas seulement pour rencontrer de nouveaux partenaires potentiels. Mais aussi pour que les gens qu’on rencontre aient un peu plus d’information sur nous.
- Le plus bête, c’est que même si je vois mon blogue comme une présentation personnelle, j’ai pas mis grand-chose qui me décrive vraiment à part le petit texte de présentation. WordPress a le concept de page et je devrais vraiment l’utiliser pour me présenter. Appelons ça de la paresse. Ou de la distraction.
- Je communique en-ligne avec plusieurs personnes depuis un certain temps (août 1993) et j’ai déménagé assez souvent depuis ce temps (à plusieurs reprises entre 1994 et 2000 puis quatorze fois depuis décembre 2000). Avec des amis et connaissances à droite et à gauche, un blogue est un bon moyen pour moi de dire aux gens où j’en suis.
- Un blogue, c’est aussi un “Web log”, un «carnet de bord sur le Web» ou un “public diary”, un «journal pas si intime que ça». Ça joue un peu les mêmes rôles, au niveau de l’écriture.
- J’aime bien rencontrer de nouvelles personnes dans des contextes différents et bloguer m’a permis d’entrer en contact avec certaines personnes que je n’aurais pas connues autrement. Mais ça, je le fais surtout par courrier électronique, en fait.
Dans tout ça, je sens vraiment pas de préoccupation pour avoir un plus grand nombre de visiteurs. Même ce dernier point, sur les contacts. Ça me plaît vraiment quand quelqu’un me fait un commentaire sur un blogue, probablement que ça flatte même mon égo (je sais pas trop comment). Mais c’est pas une question d’avoir beaucoup de visiteurs. C’est une question d’avoir des visiteurs actifs. Sur ce point, j’ai pas vraiment réussi puisque je n’ai reçu que quelques commentaires sur mes blogues. D’ailleurs, c’est intéressant de voir que j’ai plus facilement des commentaires sur un blogue que sur un autre. Mais, justement, j’écris très peu sur ce blogue plus propice aux commentaires. Peut-être parce qu’il est sur un service plus personnel. Ou, plus probablement, parce que j’avais déjà des billets sur mon premier blogue (sur Blogger/Blogspot) et que j’avais l’intention de regrouper le plus possible mes billets, ce que WordPress.com permet (puisqu’il permet d’importer un blogue depuis Blogger). Quoi qu’il en soit, j’ai pas vraiment fait d’effort pour avoir un lectorat assidu et actif.
Et c’est ça l’idée. Je suis peut-être un extra-terrestre de la blogosphère, mais j’utilise pas mon blogue pour me faire de la pub et j’ai, réellement, aucune intention commerciale. J’aime ce que je fais en recherche et en enseignement, ça me suffit.
Les passions que j’ai pour le café, la bière et la musique pourraient toutes se transformer en carrières éventuelles. Ouvrir un café, un broue-pub et/ou une salle de spectacle, ça viendrait logiquement. Pas parce que je suis «talentueux» dans un de ces trois domaines. Je me suis impliqué à ma façon dans chacun de ces domaines et on m’a parfois demandé pourquoi je ne me lançais pas dans un de ces domaines. La réponse honnête, c’est que c’est loin de mes intentions premières. J’ai d’autres passions.
Oh, bien sûr, si l’occasion se présentait. C’est un «rêve secret» pas si secret que ça. Mais c’est parce que c’est un rêve que c’est intéressant. Si je «devenais pro», je ne pourrais pas profiter de ces choses de la même façon. Ouais, vraiment, je pense comme le joueur de flûteau de Brassens.
C’est la même chose avec le blogue. Si ça devenait un truc plus professionnel, comme c’est le cas pour d’autres anthropologues, j’y prendrais probablement moins plaisir. L’idée, ici, c’est de pouvoir faire du n’importe quoi. C’est pour ça que c’est un blogue «disparate». Un minimum de structure, qui se crée organiquement. Rhizômatique, éparpillé, touffu… Un fouillis, quoi. C’est pas propre en ordre. Et je m’amuse à passer d’un registre d’écriture à un autre. C’est l’fun!
Évidemment, j’adore l’enseignement et la recherche. Alors pourquoi j’accepte d’en faire professionnellement? Ça contredit pas mon principe d’éviter de transformer mes passions en professions? Ceux qui sont dans le domaine académique, surtout en anthropologie, savent bien que c’est une façon de faire beaucoup de ce qu’on veut. Il y a des tas de contraintes et c’est énormément de travail. Mais on conserve beaucoup de liberté.
Bon, tout ça pour dire que… J’ai un lectorat en tête en écrivant des billets pour ce blogue mais je reçois pas de commentaires alors c’est un échec monumental. 😉
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